Les granitiques dents de la mer des Bouches

La villa de Piantarella. (C : 2020Maxar)

Les bouches de Bonifacio ont des dents, et ces dents sont en granite. Les célèbres îles Lavezzi, qui ornent le détroit séparant la Corse de la Sardaigne, le Fretum gallicum des Romains, sont des affleurements de roches magmatique granitoïdes d’une grande qualité. Dans ses Notes sur un voyage en Corse, Prosper Mérimée écrit en 1840 :

On suppose que les Romains, ayant reconnu l’excellente qualité de ce banc, en avaient commencé l’exploitation.

Celle-ci était en fait bien plus que commencée : il s’agissait d’une exploitation à grande échelle, que l’enquête d’un projet commun de recherche rassemblant notamment des chercheurs de l’Université libre de Bruxelles, de celle d’Aix-Marseille et le Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm), est en train de révéler. Supervisées par Laurent Sévègnes, conservateur régional de l’archéologie en Corse, ces recherches sont aussi financées en partie par la Drac de Corse et par la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui finance la recherche scientifique francophone en Belgique.

La villa de Piantarella

Tout part de l’étonnement suscité par la luxueuse villa romaine de Piantarella (voir ci-dessus sa photo aérienne). Les ruines de cet établissement côtier se trouvent près de l’îlot Piana, face à l’île Cavallo, la plus grande des îles de l’archipel des Lavezzi. La villa se dressait sur un promontoire calcaire s’avançant dans la mer entre deux étangs alimentés par des ruisseaux, celui de Piantarella au nord et celui de Sperone au sud. Grandiose, le point de vue offert par la plate-forme calcaire comprend les îles Lavezzi à quelques kilomètres à l’est et la Sardaigne plein sud. L’impression déjà créée par l’implantation spectaculaire de la villa devait être amplifiée le caractère imposant du bâtiment, tout à fait hors de proportion dans le contexte corse du début de notre ère.

La villa avait la forme d’un U, dont l’ouverture fait face à la mer tyrrhénienne. Deux ailes situées à l’est et à l’ouest flanquaient une cour centrale de 1200 mètres carrés sur laquelle donnait le bâtiment principal. L’ensemble s’inscrit dans un carré presque parfait d’environ de 66,5 mètres de côté. La résidence se trouvait dans le bâtiment principal, comprenant des bains d’une dizaine de pièces au sud. Au nord, de petites pièces font penser à des cubiculi, c’est-à-dire à des chambres à coucher. La présence d’un podium rectangulaire dans la cour suggère la présence d’une statue et la qualité de réalisation d’un appareillage en filet (opus reticulatum, typique des Ie siècles avant et après notre ère) suggère que des équipes de maçons romains sont venus apporter dans cet endroit de la Corse ce savoir-faire typique des bâtiments de qualité de la période augustéenne (31 avant notre ère à 14 de notre ère).

Des murs de la villa de Piantarella en opus reticulatum. (C: TeletubAstyanax)

La campagne bonifacienne pouvait-elle soutenir une telle villa ? Dans tout le monde romain, on connaît de grandes villas latifundiaires, des villae rusticae comportant non seulement une résidence, mais aussi de nombreux bâtiments d’exploitation et autres granges et écuries. Ces établissements produisaient des denrées agricoles en masse à partir d’un territoire considérable de terres fertiles.

Fertiles ? Qui a déjà eu l’occasion de fouler le Piali, l’ancien pallae des Romains, c’est-à-dire la «campagne de Palla» (aujourd’hui celle de Bonifacio) sait que ce socle granitique permien recouvert par un plateau rocheux calcaire (calcarénite miocène) n’a pas la fertilité de la plaine orientale corse. Du reste, cette «campagne de Palla» est une allusion à une ville romaine mentionnée dans les textes romains, mais mal située (certains auteurs la verraient près de Porto Vecchio), qui a précédé la Bonifacio fondée au IXe siècle.

Mais où se trouve Palla?

À supposer que le terme corse Piali  assure qu’elle se trouvait près de Bonifacio, où se trouvait-elle ? La première idée qui se propose est qu’elle aurait précédé la Bonifacio de fondation médiévale. La présence près de la ville d’un lieu-dit nommé campo romanello et le fait que l’endroit est réputé avoir été nommé Oppidum Palla à l’époque romaine, suggère que l’imposant rocher sur lequel se trouve aujourd’hui la citadelle était déjà fortifié à l’époque romaine, voire préromaine. Toutefois, ce n’est pas en un tel endroit que l’on installait une ville pendant la Pax romana. Par ailleurs, mieux valait l’installer avant le cap, qu’après, quand on venait de Rome, afin de ne pas s’imposer la dangereuse traversée du détroit jusqu’au fjord bonifacien. À regarder sur les images satellites, l’endroit le plus approprié (car assez vaste) du point de vue pragmatique des Romains, me semble être le premier golfe abrité situé au nord du cap, là où se trouve la plage actuelle de Sant’ Amanza :

Le Piali, c’est-à-dire le pays bonifacien. (C : 2020 Terrametrics)

Je ne trouve aucune certitude là-dessus. L’endroit est cependant la seule anse confortable pour la navigation se trouvant, face à l’Italie, au plus près des Bouches… Du reste, d’après la carte de Corse extraite de l’ouvrage L'Italie suivant les itinéraires romains par Nicolas Sanson (1600-1667) et Melchior Tavernier (1594-1665), Palla se trouvait exactement là, c’est-à-dire dans la première anse aménageable en remontant vers le nord depuis le détroit sur la côte orientale :

 

Carte de Corse extraite de L'Italie suivant les itinéraires romains par Nicolas Sanson (1600-1667), cartographe et Melchior Tavernier (1594-1665), graveur.

Alors, son investigation a-t-elle pu échapper à la vigilance des archéologues ? Non, puisque dans un rapport de 1974 ; l’archéologue Jean Jehasse note que :

À Sant'Amanza, Mme Moracchini-Mazel a dégagé sous le niveau d'une église génoise des murs qui pourraient correspondre à un édifice paléochrétien, 5 sépultures de divers types ont été fouillées. Le mobilier est rare : monnaies génoises et monnaies du IVe s., estampillé in planta pedis, quelques tessons de sigillée claire du IVe s.

J’ignore pour quelles raisons Madame Moracchini-Mazel a pensé à un «édifice paléochrétien», mais une chose est claire : lorsque vers la fin du Ve siècle, les évêques nord-africains, chassés par les Vandales, se sont repliés sur le nord de la Méditerranée (à ce propos, lire l’actualité de Pour la Science, Propriano, vieille paroisse corse) et l’ont christianisé, ils ont installé leur églises et leurs baptistères par immersion dans les villes, et non dans les campagnes ! La présence d’un bâtiment paléochrétien à Sant’Amanza est donc congruente avec celle d’une (petite] ville portuaire au même endroit.

Une villa maritime?

Quoi qu’il en soit, la présence de cette petite agglomération et la pauvreté relative du Piali – davantage propre à l’élevage qu’à la culture – me semblent signifier que les bases agricoles d’une grande villa latifundiaire n’existaient guère sur place… Alors, il pourrait s’agir d’un autre type de villa. D’après son architecture, Xavier Lafon, de l’université d’Aix-Marseille, assimile dans sa thèse la villa de Piantarella aux «villas maritimes», c’est-à-dire aux résidences prestigieuses situées en bord de mer, qu’il y a étudiées. Ce type d’architecture est en particulier particulièrement fréquent en Campanie, la région de villégiature préférée des grandes familles romaines.

L’hypothèse n’a rien d’absurde, car la navigation était le seul moyen rapide de voyage dans l’Antiquité, de sorte que le sud de la Corse se trouve face à Rome, tout près du point de vue d’une riche famille disposant des moyens de se faire emmener sur place. Toutefois, la région préférée des grandes familles romaines de la période impériale était plutôt la Campanie, et dans cette région les villas maritimes sont nombreuses. On voit mal une famille romaine préférer l’extrémité pauvre et solitaire de l’extrême sud corse pour y implanter une villa où passer, seule, les mois d’été et des retraites d’oisifs sans voisins nombreux de la même classe sociale. Alors l’idée surgit que cette villa maritime aurait plutôt été la résidence d’un potentat romain et de sa famille, et que sa richesse traduit une ostentation nécessaire à son autorité. Laquelle ?

Les Romains ont dominé (les côtes de) la Corse pendant sept siècles. De leur point de vue, cette île et tout particulièrement les Bouches de Bonifacio se trouvait tout près sur l’une de leurs principales voies maritimes : celle qui reliait la prospère province de la Tarraconaise (partie nord de l’Espagne) et par laquelle on acheminait l’huile d’olive, les blés et l’étain dont Rome avait crucialement besoin. Comme on cabotait le plus possible à l’époque, les navires romains piquaient par exemple depuis le port de Tarraco (Taragone) vers la Grande Baléare, puis de là directement vers les Bouches apparaissant comme un sorte de «viseur» pour Ostie (si l’on se trompait, les côtes de Sardaigne ou de Corse ramenaient vers les Bouches) le port de Rome ! On pouvait aussi caboter vers l’est depuis Narbonne (le plus grand port romain dans les Gaules) ou Massilia, puis viser la Corse, avant de suivre ses côtes vers le sud, les Bouches et Ostie. Du reste, Fretum gallicum signifie le «détroit gaulois», ce qui montre que dans les temps anciens, les Romains plaçaient les Bouches sur le chemin des Gaules.

Routes maritimes romaines pendant l’Empire.

Un tel endroit était donc très important pour les échanges au sein de l’Empire. Pour autant, le terme Fretum en latin, signifie aussi «là où les eaux bouillonnent». De fait, plusieurs dizaines d’épaves, dont de nombreuses épaves romaines, attestent des difficultés de sa navigation. Le vent y souffle violemment 328 jours par an (à plus de 50 kilomètres par heure), ce qui fait des Bouches l’endroit le plus venté de France. Tout le nord du détroit est encombré par l’archipel des Lavezzi et les nombreux rochers qui l’entourent ; le sud l’est celui par celui de la Maddalena. Même à l’époque romaine, le Fretum gallicum gagnait à être équipé de phares ! L’était-il ?

Phares ou fari, là est la question!

Je l’ignore et n’en ait trouvé nulle trace dans la littérature. Toutefois, si ce fut le cas, les deux lieux les plus propices pour guider les navires me semblent d’une par l’île Ratino indiquant le sud de l’archipel des Lavezzi (l’endroit le plus dangereux du nord du détroit) et d’autre part le Capo testa en Sardaigne indiquant la côte sud du détroit. Or une implantation romaine se trouvait à Capo Testa. Et un phare ? Je n’en trouve nulle trace écrite, mais une carrière romaine de granite d’ampleur y a laissé des traces:

Des restes des l'activité romaine de carrière à Capo testa. (C: Porto di San Teresa)

 

Du reste, un article y est consacré dans le Wikipedia italien, dans lequel on lit:

La présence romaine au Capo Testa semble avoir eu lieu en deux phases : une première phase entre le premier siècle avant J.-C. et le premier siècle après J.-C. et une seconde, pendant l'époque impériale tardive, entre le IIe et le IVe siècle. Il n'y avait pas de véritable centre habité, mais plutôt de petites agglomérations. Des sources du XIXe siècle mentionnent la présence des vestiges de villas à colonnes dont il ne semble plus y avoir de traces aujourd'hui.[…] L'extraction et le travail du granit ont eu lieu le long de la côte, au plus près de l'eau, afin que les objets puissent être chargés sur des navires avec une productivité maximale. Les coupes "en gradins" dans les falaises sont encore bien visibles et d'énormes blocs de pierre semi-finis sont éparpillés.

Les carrières romaines dans les îles Lavezzi, anecdotiques ou importantes?

Le Capo Testa est parfaitement visible depuis les îles Lavezzi et réciproquement. Dès lors, l’impression surgit que la villa de Piantarella a pu être celle de quelque personnage contrôlant un dispositif romain étendu à travers le Fretum gallicum. Ce dispositif a peut-être eu quelque chose à voir avec un service maritime dans le détroit (phares, aide aux naufragés,…), lequel aurait servi dans le même temps à déplacer les carriers dans le cadre d’une exploitation à grande échelle du granite de la région située pratiquement aux portes de Rome.

«Le granite était un matériau de très haute valeur à l’époque romaine», souligne Sébastien Clerbois. De fait, ce que les Romains étaient prêt à organiser pour faire parvenir à Rome des matériaux rocheux de haute qualité dépasse presque l’entendement, quand on réalise qu’ils eurent par exemple des carrières de granite sur le Mons Claudianus dans le désert oriental de l'Égypte, et qu’ils faisaient tirer par des centaines d’ânes et de mules jusqu’au Nil à travers 140 kilomètres de désert des blocs de granodiorite pesant parfois plus de 100 tonnes Et que trouve-t-on sur l’île de Cavallo ? «De la granodiorite en gros blocs massifs bien homogène et pas faillés», répond Nadine Matielli, une géochimiste de l’Université libre de Bruxelles, qui participe au projet.

L'île de Cavallo vue du Ciel. (C: Google maps)

Jusqu’à récemment, on ne réalisait pas l’ampleur de l’exploitation romaine, car l’opinion courait qu’une exploitation menée au XIXe siècle avait effacé les traces de l’activité des carriers romains. De fait, on sait que la carrière de San Bainzu a fourni les appareillages de pierre du port de Bonifacio et le bâti du phare des Lavezzi. « Toutefois, après avoir inventorié le bassin d’exploitation de la granodiorite dans l’archipel, nous pouvons affirmer que les traces d’exploitation romaine de granodiorite sur Lavezzu, Cavallo et San Bainzu sont de grande ampleur et largement intactes», confie Sébastien Clerbois.

Les chercheurs en train d'inspecter l'un des fronts de taille de la carrière romaine de Cavallo. (C: ULB)

Les chercheurs ont notamment évalué l’ampleur de l’activité en répertoriant les cônes détritiques constitués sous la mer par les déchets de taille jetés à l’eau. L’impression générale est que les Romains auraient exploité une énorme carrière dans l’archipel Lavezzi.

L’îlôt de San Bainzu porte encore des fûts de colonnes commencées, des tas de débris de taille et semble avoir été relié par une structure à Cavallo toute proche (en haut à droite). Une digue ? Des restes de carrière ? Un chemin ? (C : Google maps)

Sur l’îlôt de San Bainzu, ils ont aussi trouvé des fronts de taille… sous-marins.  C’est là un détail très intéressant si l’on se rappelle les constatations italiennes dans la carrière de Capo Testa : L'extraction et le travail du granit ont eu lieu le long de la côte, au plus près de l'eau, afin que les objets puissent être chargés sur des navires avec une productivité maximale. Or on estime que depuis l’époque romaine, le niveau marin a pu grimper de jusqu’à un 1,2 mètre. Puisqu’il semble exclu que les carriers aient travaillé les pieds dans l’eau, le front de taille de San Bainzu suggère un minimum à l’élévation marine… ou alors que les carriers s’étaient arrangés pour chasser la mer d’une zone exploitée… «Une des hypothèses à explorer est que les deux îles étaient alors connectées » commente sobrement Sébastien Clerbois.

À ce propos, sur les images de Google maps, on aperçoit une bande brune sous-marine de la taille d’un chemin courant de de Cavallo à un micro-îlot, puis de ce dernier à San Bainzu (ci-dessus)… Sa nature reste peu claire à ce stade : il pourrait ne s’agir que de déchets de carrières…

Les chercheurs belges ont aussi réalisé un sondage archéologique au sein d’une structure de 10 par 6 mètres constituée de gros blocs de granite à la recherche du niveau romain. «Située au centre de la zone d’exploitation, mais dans un endroit abrité, cette structure pourrait correspondre à l’emplacement d’une cabane, où les carriers entreposaient leurs outils, les affûtaient ou venaient prendre leur repas et s’abriter du soleil», estime Sébastien Clerbois.

La présumée cabane de carriers romains en train d'être sondée par les archéologues du projet. (C: ULB)

Une habitation romaine de deux pièces pavées de rouge en opus spicatum (en épi) se trouve par ailleurs face à la Cala di Palma.  Dans l’un de ses rapports, Jean Jehasse résume ainsi la fouille que Paul Agostini y mena suite à un sondage sauvage dans les années : Dans l'île Cavallo, P. Agostini a fouillé une habitation du IIe s. dont il a dégagé le mur de façade et deux pièces carrelées en opus spicalum. Le mobilier comporte de la sigillée A, un exemplaire de la Graufesenque, plusieurs tessons de céramiques communes et de lampes des IIe/me s. Pour Sébastien Clerbois, sa présence pousse à imaginer «que la villa de Piantarella et cette habitation modeste, mais soigneusement construite, sont en rapport avec l’activité de carrière. »

L’île de la Marmorata près de la côte sarde porte des traces d’extraction de colonnes en granite. (C : Google maps)

Conclusion ? Depuis la villa de Piantarella, un administrateur de carrières pouvait apercevoir la plupart des bancs de granite facilement les plus intéressants à exploiter. Les cas de colonnes commencées, mais non terminées que l’on aperçoit tant à Capo testa, que sur les îles de Marmorata suggère que c’était ces éléments essentiels des façades de constructions prestigieuses romaines que l’on apprêtait. Leur production était une affaire assez sérieuse pour induire un marché d’empire. Leur valeur sans doute énorme. Et les carrières du Fretum gallicum, à quelques heures de Rome par voie d’eau et fournissant de la si bonne granodiorite, étaient particulièrement intéressantes et, sans doute, rentables.

Pour conclure: des questions et encore des questions?

S’agissait-il pour autant de carrières impériales, c’est-à-dire de carrières appartenant à l’empereur et gérée par l’administration des carrières impériales le ratio marmorum ? « Nous avons les listes des marbres (parmi lesquels les Romains classaient les granites), mais les granites corso-sardes n’y figurent pas. En l’état, il est donc hautement improbable que les sites que nous étudions aient été gérés par le ratio marmorum », estime Sébastien Clerbois.

Pourtant, peut-on se dire, la Corse a fait à plusieurs reprises partie de l’apanage impérial. Vers 1988, Étienne Michon a longuement discuté ce que l’on peut tirer des textes romains et des inscriptions quant à l’administration de la Corse, et il en ressort que celle-ci a soit été administrée par un préteur (un gouverneur de province) soit par un procurateur (un intendant impérial), soit seule, soit en même temps que la Sardaigne. Ainsi, l’île passa à l’empereur Auguste en l’an 6 et ne fut rendue au peuple romain que 60 ans plus tard par Néron. Dès lors, la villa de Piantarella fait penser à la résidence d’un procurateur ou à un prétoire, c’est-à-dire à la résidence d’un préteur….

Dans le premier cas, les carrières auraient été gérées par le ratio marmorum, au moins pour un temps et la villa de Piantarella s’interpréterait comme son siège, implanté de façon à faciliter la gestion des carrières et du détroit. Comme le statut de la Corse était changeant, celui des carrières l’aurait été aussi, ce qui explique peut-être que le granite corse ne soit pas mentionné dans les sources, même s’il était impérial, au point d’avoir servi à construire le Panthéon à Rome… Dans le cas où la villa de Piantarella est bien la résidence d’un procurator, on peut imaginer que son implantation s’explique à la fois par la nécessité de gérer les carrières et par celle de gérer un détroit faisant partie des routes maritimes vitales de Rome. Cette logique s’applique aussi si les carrières, d’abord impériales (ou jamais impériales) ont été gérées par un préteur, de sorte que la villa de Piantarella peut aussi s’interpréter comme un prétoire, d’où on aurait aussi administré les carrières. Et puis, comme l’habitude s’est prise de nommer «prétoire» les prestigieuses villas de villégiature des grandes familles romaines, c’est en employant ce terme de façon vague que l’on court le moins de risque de se tromper…

Quoi qu’il en soit, si l’idée que la villa de Piantarella ait été le lieu villégiature d’une grande famille romaine qui préférait risquer la traversée pour venir jouir d’un otium (temps libre) maritime plutôt que se rendre en voiture à cheval en Campanie, on peut au moins envisager qu’elle appartenait à un riche entrepreneur enrichi. Celui-ci, corse peut-être, se serait installé en face de son activité pour mieux la contrôler. Les restes d’une espèce de quai découvert par les archéologues sous l’eau près de la villa s’expliqueraient bien par cette hypothèse : a-t-il servi à accueillir une flottille privée ?

Comme le Fretum était un endroit dangereux, chacun de ces acteurs possibles, fonctionnaire impérial, préteur ou patron, avait intérêt à disposer de quelque service de sauvetage ou d’assistance à la navigation dans le détroit, et il aurait côtoyé et travaillé main dans la main avec celui qui en était chargé afin de toujours disposer des moyens de se déplacer dans le dangereux détroit. Ce serait en tout cas bien dans la manière si pragmatique des Romains, que de doubler l’utilité de l’installation d’une exploitation (impériale ? républicaine privée) par celle d’un service utile et nécessaire, public ou pas. Le dispositif d’aide à la navigation dans le détroit se serait aussi chargé de déplacer des équipes de carriers d’une rive à l’autre, lesquelles, pour se rendre d’un chantier à l’autre, ne pouvaient que confier leurs vies à des marins professionnels connaissant les Bouches comme leur poche… Je pousse là les hypothèses très loin, et, à rebours, il semble étonnant que l’exercice d’un tel service ne soit pas évoqué dans les textes étant donné l’importance de la navigation dans les Bouches. Cette constatation s’explique peut-être seulement par le fait que peu, trop peu de textes, nous sont parvenus…

Manifestement, le statut de Piantarella n’est pas encore vraiment compris. Avoir prouvé la proximité de cette grande résidence avec une activité économique intensive pouvant expliquer sa présence est déjà un grand progrès,… qui ne suffit pas… Les chercheurs du projet ont donc encore du granite à moudre. La géochimiste Nadine Matielli a analysé la composition de la granodiorite corse, afin d’être en mesure de rechercher la pierre de Cavallo dans les colonnes de divers monuments romains. La roche constituant une colonne de granite censée avoir été emportée depuis Cavallo pour décorer l’entrée de Bonifacio sera la première analysée. Les chercheurs veulent ensuite examiner le bâti romain de Corse. Et puis, ensuite, pourquoi pas, celui de l’Italie… Les colonnes du Panthéon de Rome sont probablement construites avec le granit du Capo Testa, écrit-on dans le Wikipedia italien, ce qui surprend car des textes les réputent provenues du Mons Claudianus. Et si elles provenaient plutôt de Cavallo ?  Ou d’un tout autre endroit ? À suivre.  

 

 

 

 

 

 


5 commentaires pour “Les granitiques dents de la mer des Bouches”

  1. Nathalie Répondre | Permalink

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