Certains l’aiment chaud
C’est l’été, saison de la drague et les conversations plus ou moins élaborées vont fleurir dans les night-clubs. Exemple au résultat non garanti : « il fait chaud ou c’est vous qui me faites cet effet là ? » Chez les lamproies, la question ne se pose pas. Une équipe de l’Université du Michigan, aux États-Unis, vient de montrer chez les lamproies marines que les mâles disposent d’un organe qui produit de la chaleur : les femelles n’y résistent pas et succombent immanquablement !
Les lamproies sont des vertébrés aux caractéristiques primitives. Ainsi, elles n’ont ni membres pairs ni mâchoire (on parle d’agnathes). Leur bouche est néanmoins ornée de nombreuses dents, arrangées selon plusieurs cercles, grâce auxquelles l’animal peut s’arrimer à des proies, tels des saumons, des truites… dont elles aspirent le sang et les autres liquides corporels.
Les lamproies sont des espèces anadromes, c’est-à-dire qu’elles vivent en mer et se reproduisent en eau douce. Du début du printemps au début de l’été, lorsque vient la saison des amours et donc des conquêtes, mâles et femelles se retrouvent dans des frayères, le plus souvent des zones repérées grâce à des phéromones secrétées par... des larves des années précédentes. En d’autres termes, les enfants reviennent sur les lieux des premières amours de leurs parents !
Là, les mâles attirent les femelles par d’autres phéromones. Une fois installés dans un nid collectif construit par un groupe, le mâle s’enroule autour de la femelle et la frotte avec une petite protubérance dorsale. Quand la femelle est séduite l’accouplement peut avoir lieu.
On a longtemps pensé que la protubérance agissait de façon mécanique, afin de stimuler la libération des ovules. Le groupe de Yu-Wen Chung-Davidson a voulu en savoir plus. L’étude de cette bosse a montré qu’il s’agissait d’un tissu adipeux (des lipides) différent chez les mâles et chez les femelles ; c’est donc bien la marque d’un dimorphisme sexuel. Une analyse plus poussée a révélé que les lipides correspondent à ceux que l’on trouve dans le tissu adipeux brun des mammifères hibernants et des nouveaux-nés chez qui il sert à produire de la chaleur. Or les lamproies étant à sang froid, leur température corporelle est celle du milieu ambiant. Pourtant la température autour de la protubérance augmente de 0,3 degré, voire plus. Et les auteurs de conclure que cette chaleur « torride » vient à bout des réticences de madame lamproie… Personne n’est parfait !
Pour en savoir plus :
- Y.-W.Chung-Davidson et al., A thermogenic secondary sexual character in male sea lamprey, J. Exp. Biol., vol. 216, pp. 2702-2712, 2013.