Demain, tous crétins ? Ou pas.

Franck Ramus et Ghislaine Labouret

Version intégrale d'un article paru dans Cerveau & Psycho n°100, Juin 2018.

 

Le documentaire « Demain, tous crétins ? », diffusé le 11 novembre 2017 sur Arte, a employé les grands moyens pour faire paniquer la population française : l’intelligence (mesurée par les scores de quotient intellectuel, QI) serait en train de décroître dramatiquement, et les causes en seraient différents facteurs environnementaux, en particulier les perturbateurs endocriniens. Dans cet article, nous réévaluons les données présentées à l’appui de l’hypothèse selon laquelle les scores de QI seraient en train de baisser.

Le contexte de ce débat est celui de l’effet Flynn, à savoir le fait que dans tous les pays où des batteries de tests de QI ont été étalonnées depuis plusieurs décennies, on observe une croissance des scores équivalente à 3 points de QI par décennie, et ce tout au long du 20ème siècle. Autrement dit, en l’espace d’un siècle, la distribution des scores de QI de la population a progressé de deux écarts-types, c’est-à-dire de 30 points de QI (construit par convention avec une moyenne de 100 et un écart-type de 15 points dans une population donnée). Tout un ensemble de causes semble avoir conspiré pour engendrer une telle hausse: amélioration de l’alimentation (et notamment décrue de la malnutrition), amélioration de la santé (et notamment diminution drastique de l’exposition à des facteurs de risques prénataux, des souffrances à la naissance, et d’un certain nombre de maladies infantiles affectant le développement du cerveau), généralisation de la scolarisation et élévation de la sophistication de l’éducation, augmentation globale de l’information…

Depuis quelques années, une poignée de chercheurs s’alarment de ce que, non seulement les scores de QI ne progresseraient plus, mais ils commenceraient même à régresser. Edward Dutton (longuement interrogé dans le documentaire) et Richard Lynn sont le fer de lance de ce discours catastrophiste, qui invoque tantôt les effets de la malbouffe, de la dégradation de l’environnement, du dysgénisme (sélection des variants génétiques associés à une faible intelligence) ou encore de l’immigration1,2. Pourtant, un examen rigoureux de l’ensemble des données internationales portant sur l’évolution des scores de QI ne vient pas à l’appui de ce discours.

Un constat très partial

La première remarque importante à faire est que le constat de Dutton et Lynn ne s’appuie que sur les études menées dans un nombre limité de pays, notamment plusieurs pays scandinaves, ainsi que la France. Si l’on regarde les données de l’ensemble des pays du monde, on observe que les scores montent dans certains pays, stagnent dans d’autres, et diminuent seulement dans une minorité d’entre eux, ou dans une minorité d’études au sein de chaque pays.3,4 Par exemple, les scores de QI continuent globalement à progresser aux Etats-Unis, alors que ce pays semble a priori plus concerné que bien des pays européens par la malbouffe, l’exposition aux pesticides et aux perturbateurs endocriniens, et est tout autant concerné par l’immigration. Pourquoi ces facteurs ne produiraient-ils pas le même effet aux Etats-Unis qu’en Finlande ou en France ? Mystère.

Si l’on examine les données disponibles sur l’ensemble des pays, le constat est beaucoup moins alarmiste : une méta-analyse de 271 études dans 31 pays sur plus d’un siècle suggère simplement un plafonnement sur les 30 dernières années : les gains de QI diminuent avec le temps, sans pour autant devenir nuls à ce jour (Figure 1).

Figure 1. Tendance des différents indices de QI de 1909 à 2013 à travers tous les pays et toutes les études (méta-analyse de Pietschnig & Voracek, 2015)4.

 

Un deuxième point troublant est que, même dans les pays qui semblent montrer une baisse des scores de QI, ce phénomène est loin d’être univoque. Par exemple, en Finlande, la baisse mesurée entre 1997 et 2009 ne concernait que les tests numériques et verbaux, alors que le raisonnement logique présentait seulement une stagnation. De même, en Norvège sur la période 1993-2002, on a observé une légère baisse en capacités verbales et en arithmétique, compensée par une hausse en raisonnement abstrait. Si les facteurs à l’œuvre dans la supposée baisse des scores de QI étaient aussi généraux que les perturbateurs endocriniens ou la nutrition, ils devraient avoir un effet sur l’ensemble des capacités cognitives, plutôt que sur certaines et pas d’autres. D’autres facteurs peuvent entrainer des baisses de scores aux tests, comme le vieillissement des énoncés ou des modifications des programmes scolaires. Une baisse temporaire, du même ordre que celle observée récemment, s’est déjà produite dans les années 1970 en Norvège, en lien avec une modification du programme de mathématiques. Moins habitués aux exercices proposés, les jeunes adultes obtenaient des scores inférieurs, sans que cela ne traduise une baisse de leur intelligence.

La France en déclin ?

Examinons maintenant le déclin supposé des scores de QI en France. À chaque nouvelle édition française des échelles de Wechsler (la batterie de tests de QI la plus utilisée dans le monde), l’éditeur fournit les résultats d’une comparaison avec la version précédente, sur un petit groupe de participants. Cette comparaison a toujours pointé dans le sens d’une amélioration, sauf pour la standardisation, en 2010, de l’échelle pour adultes WAIS-IV. C’est sur ce seul résultat, mesuré sur un groupe de 79 personnes, que se basent l’étude de Dutton et Lynn5 et le documentaire « Demain, tous crétins ? » pour suggérer qu’une baisse du QI serait à l’œuvre en France. Une telle conclusion, à partir d’une seule mesure sur un petit groupe non représentatif, est largement exagérée, compte tenu des erreurs possibles de mesure des scores.

De plus, si des facteurs environnementaux nouveaux entravaient le développement cérébral et intellectuel des enfants, on s’attendrait à observer une baisse des scores de QI en premier lieu chez les enfants, avant que cette baisse ne se propage à toutes les classes d’âge au fur et à mesure que ceux-ci grandissent. Curieusement, l’étude de Dutton et Lynn ne rapporte que la tendance des scores des adultes français, et s’abstient de rapporter la tendance des scores des enfants, alors qu’elle est tout aussi disponible. L’examen des manuels des différentes éditions des batteries WISC pour enfants permet de comprendre pourquoi : elle montre que la tendance est toujours à la hausse, contrairement à l’hypothèse de Dutton et Lynn !

La Figure 2 montre les évolutions successives des scores de QI observées en France à l’occasion des nouvelles versions des tests, pour adultes (WAIS) et pour enfants (WISC) ainsi que l’incertitude des mesures liées aux faibles effectifs des groupes utilisés.

Figure 2. Evolution cumulée du QI depuis 1968 à chaque nouvelle édition d’une échelle de Wechsler (sources : manuels des tests). Les barres d’erreur représentent l’intervalle de confiance à 95% de la mesure, c’est-à-dire un intervalle qui a 95% de chances de contenir la valeur vraie compte-tenu de l’imprécision liée au faible nombre de participants. Les données des adultes et des jeunes sont superposées pour permettre une comparaison des vitesses d’évolution, mais ne sont pas comparables entre elles.

 

Enfin, il est important de souligner que la méthode choisie par Dutton et Lynn, basée sur les données de standardisation des échelles de Wechsler, souffre d’importantes limites et n’est pas considérée comme fournissant une estimation fiable de l’effet Flynn6. Par ailleurs, une limite méthodologique d’ordre de passation des batteries WISC-IV et V empêche d’interpréter la dernière tendance observée chez les enfants français (cf. Annexe). La seule chose qui soit sûre, c’est que compte tenu du faible effectif et de l’erreur de mesure, aucune tendance observée ne permet de tirer des conclusions à l’échelle de la population française.

Au final, que cela soit en Finlande, en France ou dans d’autres pays, les résultats avancés à l’appui d’une baisse des scores de QI ne sont pas du tout convaincants, et le détail de ces résultats est incompatible avec les facteurs présentés comme étant les causes d’une baisse du QI. Si l’on prend en compte l’ensemble des données internationales, aucune baisse n’est détectable, mais il semble néanmoins possible d’affirmer que les scores de QI progressent plus lentement qu’auparavant, et sont peut-être en train de se stabiliser et d’atteindre un plafond.

Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel

Pourquoi un tel plafonnement ? Il est possible que l’on approche tout simplement des limites intrinsèques à l’espèce humaine. Après tout, comment pourrait-on croire que les capacités cognitives puissent croître à l’infini ? Les capacités cognitives de notre espèce sont limitées par le nombre de neurones que nous possédons, qui est limité par la capacité de la boîte crânienne, qui est elle-même limitée par les dimensions du bassin des femmes. À génome et à nombre de neurones constant, l’amélioration considérable de l’environnement des humains au cours du 20ème siècle a permis à nos capacités cognitives d’atteindre de nouveaux sommets. Néanmoins, il est fort possible que l’on atteigne actuellement des niveaux de santé, de nutrition et d’éducation optimaux pour l’intelligence humaine, tels qu’il n’y aurait plus de marge de progression, ni génétique, ni environnementale… à moins peut-être d’une révolution éducative que nous n’imaginons même pas, et qui nous ferait franchir un nouveau palier. Possibilité qu’on ne peut exclure a priori.

Si les scores de QI sont réellement en train de plafonner, alors il est parfaitement normal que des erreurs de mesure et autres fluctuations statistiques donnent lieu à des diminutions apparentes, à certains moments, dans certains pays, sur certains tests et certaines populations. De telles observations restent néanmoins compatibles avec une augmentation globale continue mais toujours plus faible et difficile à quantifier de manière fiable.

Notons pour terminer que cet effet de plafonnement n’est pas spécifique au QI, mais s’observe dans bien d’autres domaines comme la stature7, la longévité, et les performances sportives8, qui ont suivi la même progression que les scores de QI au cours du 20ème siècle, et qui semblent maintenant aussi se stabiliser. Dans ces domaines, personne ne s’alarme de ce plafonnement, ni des diminutions occasionnelles dans certains pays, qui sont interprétées comme des fluctuations statistiques normales et non comme une conséquence d’un environnement délétère. L’interprétation généralement acceptée est que l’on touche aux limites de la physiologie humaine, dans l’environnement physique qui est le nôtre.

Il y a donc toutes les raisons de tirer les mêmes conclusions pour l’intelligence humaine. Dans 10 ou 20 ans, nous aurons un peu plus de recul pour apprécier, mettre en perspective et interpréter les quelques diminutions de scores observées dans certains pays. En attendant, il n’y a absolument pas lieu d’affoler les populations de manière inconsidérée.

PS: une suite à cet article est publiée ici.

Références

  1. Dutton, E., van der Linden, D. & Lynn, R. The negative Flynn Effect: A systematic literature review. Intelligence 59, 163–169 (2016).
  2. Woodley of Menie, M. A., Peñaherrera-Aguirre, M., Fernandes, H. B. F. & Figueredo, A.-J. What Causes the Anti-Flynn Effect? A Data Synthesis and Analysis of Predictors. Evol. Behav. Sci. (2017). doi:10.1037/ebs0000106
  3. Flynn, J. R. & Shayer, M. IQ decline and Piaget: Does the rot start at the top? Intelligence 66, 112–121 (2018).
  4. Pietschnig, J. & Voracek, M. One Century of Global IQ Gains: A Formal Meta-Analysis of the Flynn Effect (1909–2013). Perspect. Psychol. Sci. 10, 282–306 (2015).
  5. Dutton, E. & Lynn, R. A negative Flynn Effect in France, 1999 to 2008–9. Intelligence 51, 67–70 (2015).
  6. Weiss, L. G., Gregoire, J. & Zhu, J. Flaws in Flynn Effect Research With the Wechsler Scales. J. Psychoeduc. Assess. 34, 411–420 (2016).
  7. NCD Risk Factor Collaboration (NCD-RisC). A century of trends in adult human height. eLife 5, e13410 (2016).
  8. Marck, A. et al. Are We Reaching the Limits of Homo sapiens? Front. Physiol. 8, (2017).
  9. Grégoire, J. Devenons-nous plus intelligents ? J. Psychol. 38–42 (2006). doi:10.3917/jdp.234.0038
  10. Williams, R. L. Overview of the Flynn effect. Intelligence 41, 753–764 (2013).
  11. Trahan, L. H., Stuebing, K. K., Fletcher, J. M. & Hiscock, M. The Flynn effect: a meta-analysis. Psychol. Bull. 140, 1332–1360 (2014).

Annexe technique

L’effet Flynn peut être mis en évidence en comparant les scores obtenus, à un même test d’aptitudes cognitives, par des générations successives. C’est ce que permettent parfois les tests administrés aux conscrits, donc à de larges cohortes de jeunes d’âge voisin au moment de la passation. Ainsi, en France entre 1949 et 1974 le gain sur un test de raisonnement logique (matrices de Raven) a été en moyenne équivalent à 1 point de QI par an, tandis que le gain sur des tests verbal et numérique était trois fois moindre9. La validité de ces données est toutefois limitée par le fait que les chiffres de 1974 sont issus d’un échantillon représentatif de 200 jeunes hommes, et non sur une cohorte complète. Le documentaire « Demains, tous crétins ? » indique que « depuis 20 ans, le QI a baissé de 2 points par décennie en Finlande », résultat basé sur les données des conscrits, rapportées par les chercheurs Edward Dutton et Richard Lynn. Cette baisse a en fait été mesurée entre 1997 et 2009, et concernait les tests numériques et verbaux, le raisonnement logique présentant seulement un arrêt de sa hausse. Sur une période voisine (1993-2002), la tendance était moins nette en Norvège, avec une légère baisse en verbal et en arithmétique, compensée par une hausse en raisonnement. Dans ce pays, une baisse de la même ampleur des scores sur le test numérique s’était produite dans les années 1970, attribuable à un changement de programme dans l’enseignement des mathématiques durant cette période, avec un focus sur l’algèbre au détriment de l’arithmétique. L’annulation de ce nouveau programme scolaire s’était accompagnée d’un rattrapage à la hausse du score en arithmétique. Cet épisode montre que ce type de scores est sensible à des facteurs simples et volatiles, comme l’évolution du contenu de l’enseignement. La différence observée ne concerne alors pas l’intelligence générale, mais quelques compétences spécifiques.

Une autre façon d’évaluer l’évolution de l’intelligence consiste à comparer les scores obtenus par un groupe de personnes sur deux versions successives d’un test, comme les échelles d’intelligence de Wechsler, mesures de référence du QI. Au moment de sa conception, chaque version est standardisée pour que le score moyen d’un échantillon représentatif de la population soit de 100. En faisant passer à la fois la nouvelle et l’ancienne version du test à un groupe de personnes, on a souvent constaté que leur score était supérieur de quelques points avec l’ancienne version. Autrement dit, leurs performances sont légèrement supérieures à celles de la population qui a permis d’établir les normes de l’ancien test. Si le groupe est représentatif de la population actuelle, on peut être tenté d’en conclure que le niveau de la population dans son ensemble s’est amélioré. Cependant, le groupe en question est généralement de taille trop faible pour autoriser une telle généralisation. De plus, comme la comparaison est faite globalement, pour tous les niveaux intellectuels et pour de larges tranches d’âge, on ne sait alors pas si l’amélioration concerne tout le monde au même degré. Elle pourrait résulter d’une meilleure prise en charge des difficultés d’apprentissage, comme d’une amélioration de la santé des ainés entraînant un recul du déclin cognitif lié à l’âge. Certains chercheurs ont par exemple suggéré que l’amélioration concernait surtout les niveaux d’intelligence les plus bas, et moins les performances élevées, mais cette observation n’est pas générale10,11.

Au-delà des problèmes de taille d’échantillon, conclure à l’évolution du niveau d’intelligence à partir de la comparaison de versions différentes d’un test pose problème. En effet, la mise à jour des échelles de Wechsler s’accompagne d’un changement des exercices composant le test, si bien que les deux versions ne mesurent pas exactement la même chose. Certains changements résultent des progrès de la recherche sur les aptitudes cognitives en jeu dans les activités intellectuelles, qui ont permis d’identifier progressivement les aptitudes les plus importantes, qui se voient accorder plus de poids dans le calcul du QI. D’autres visent à adapter le contenu des exercices à l’évolution de la culture, des connaissances et des compétences moyennes de la population du moment. Dans le cas de la WAIS-IV, on constate que la moindre performance des sujets français sur l’ancienne version est essentiellement concentrée sur les exercices consistant à définir des mots de vocabulaire ou à répondre à des questions de culture générale. Or, le contenu de ces exercices a été remis à jour à l’occasion de la WAIS-IV, avec des questions portant sur des sujets plus d’actualité.

Afin de comparer l’évolution de la même mesure au fil des générations, il est nécessaire, comme dans le cas des conscrits, de faire passer exactement le même test à des groupes représentatifs de la population, à périodes successives. C’est ce qu’ont fait Laurence Weiss et collègues6, à partir des données américaines de l’échelle pour enfants, le WISC-IV. Ils ont comparé les scores obtenus par un groupe représentatif de 126 jeunes en 2013 à ceux obtenus par un groupe apparié en 2002. Ils constatent un maintien de la hausse du QI sur cette période, avec 0.31 points de QI par an. Alors qu’en comparant ce test à sa dernière version, le WISC-V, on obtenait une hausse de seulement 0.14 points de QI par an, qui suggérait un net ralentissement de l’effet Flynn (0.33 points par an auparavant), résultat qui s’avère donc trompeur.

En France, la comparaison entre WISC-IV et WISC-V semble au premier abord indiquer également une poursuite de la hausse sur la période 2004-2015, de l’ordre de 0.13 points par an. Cependant, l’étude présente un biais car tous les participants ont passé la version récente avant la version ancienne. Or, la passation d’un test cause un effet d’apprentissage qui résulte en de meilleurs scores sur le second test passé, ici la version ancienne. Lors des éditions précédentes, l’ordre de passation était contrebalancé entre les participants, ce qui permettait de neutraliser en grande partie ce biais. Pour la WISC-V française, cela n’a pas été le cas, et on ne peut donc pas attribuer la hausse observée à une amélioration du QI.

Au final, comparer les versions successives des échelles de Wechsler n’est pas une méthode valide pour tirer des conclusions sur l’évolution de l’intelligence à l’échelle de la population d’un pays, ni pour déterminer les causes de cette évolution.


48 commentaires pour “Demain, tous crétins ? Ou pas.”

  1. LG Répondre | Permalink

    Puisque vous parlez de Flynn, il me semble qu'il a aussi fait l'hypothèse que le carriérisme des femmes les plus intelligentes (rendu possible par leur émancipation relativement récente?), et la baisse de fécondité qui lui était lié, pouvait aussi être une explication à la baisse du QI d'une population.
    Qu'en pensez-vous?

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      C'est ce qu'on appelle l'hypothèse dysgénique: les gens ayant les meilleures prédispositions génétiques pour l'intelligence se reproduisent moins, donc cela devrait diminuer la fréquence des allèles en question. Le premier fait est avéré. La question de savoir si cet effet est d'une taille suffisante pour avoir un impact significatif sur le QI moyen de la population à l'échelle de quelques décennies reste très débattue. La question de savoir si un tel impact a été observé est débattue aussi.
      Par exemple, l'article dans PNAS récemment discuté dans le Monde et sur France Culture rejette l'hypothèse dysgénique pour les variations de QI observées dans la population norvégienne de 1965 à 1991.
      http://www.pnas.org/content/early/2018/06/05/1718793115

  2. Mélusine Répondre | Permalink

    Richard Lynn est de toutes façons connu pour ces "théories" racialistes... qu'il semble tenter de prouver par des moyens fort contestables. Dommage qu'Arte partage ce genre de documentaires, et merci à toi de debunker ça!

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Certes, Richard Lynn a des idées racistes et sexistes qu'on peut ne pas apprécier. Cela n'implique pas qu'il a tort sur tout ce qu'il dit, et donc ne dispense pas de discuter ses arguments scientifiques sur le fond.

      • Mélusine Répondre | Permalink

        Non, bien entendu. Et au contraire, même!

  3. kervennic@gmail.com Répondre | Permalink

    J'ai parcouru a la Fnac le livre de Barbara Demeneix et il me semblait qu'elle evoquait d'autre tests beaucoup moins sujet a discussion, comme la mesure des temps de reaction. Ce qui pour le coup devrait vraiment nous inquieter.

  4. kervennic Répondre | Permalink

    J'ai ete scientifique dans une vie anterieure et il est clair que tout travail, meme en science dure, est sujet a caution et que le dernier mot n'est pas dit apres une ou deux etudes.
    Ceci dit, le role du bon scientifique (car il y' en a de mauvais, ceux qui ont un agenda qui les pousse a maquiller ou discrediter), c'est de rechercher les mecanismes a l'oeuvre et lever les incertitudes. Donc il faudra chercher d'autres voies pour infirmer ou confirmer ces conclusions.

    Ensuite on peut se poser la question de la pertinence de cette theorie decliniste, et de l'existence de ses etudes. Or il apparaitra je pense pour beaucoup que cette theorie decliniste est legitime pour explorer le fait humain et biologique. C'est ce qu'on demande a une theorie: emettre des hypotheses verifiables.

    En effet au regard de l'archeologie, on a de nombreux elements qui demontreraient que certains caracteres humains "regressent" avec la densification et toute les modifcations sociales et environementales que cela entraine: l'homme de cro magnon etait plus fort et plus grands que ces successeurs du neolithique. Nous sommes nous meme plus grands mais beaucoup plus chetifs que nos ancetres agriculteurs qui utilisaient des l'adolescence leur muscles intensement.

    Bref l' apparition d'arme et de machine ou de bete domestique transforme profondement l'humanite.

    De meme pour l'intelligence: aujourd'hui un individu n' a pas besoin de connaitre des centaines de plantes pour manger ou fabriquer des outils. Nous sommes aussi sedentaires et n'avons pas a nous orienter sans carte sur des centaines voir un milier de km. Et nous avons une memoire physique socialisée, l'ecriture, qui rend inutile l' apprentissage de connaissance importante au niveau individuel. D'ou une possible degenerescence de certaines facultés. Or parait il le cerveau de cro magnon etait significativement plus gros, ce qui n'aurait rien d'etonnant.

    Ensuite, il y' aussi un probleme environemental qui se rajoute: la densification s'est toujours faite sur le dos de l'environement. Depuis le debut de l'agricultture notre alimentation a du changer par appauvrissement de certaines sources alimentaires. Aujourd'hui on ingere en plus des contaminants de plus en present car s'accumulant (typiquement les organochlores, quasiment eternels).

    Il est donc legitime de se poser la question d'une influence de ces changement.

    Des gens comme Demeneix trouvent des elements tres inquietants dans leurs etudes. Soit ils trichent, soit ils ont raison (la il s'agit de donnees reproductibles car non historique).
    Partant se pose la question de leur implication pour l'homme.
    D'ou l'interet vif pour de telles etudes qui vont evidemments se multiplier.

    Le QI n'est peut etre pas le bon outil car il se fonde sur l'apprentissage qui a une forte composante sociale et culturelle. Parcontre les temps de reaction sont moins sujets a de tels biais et peuvent meme etre mesure de facon "physiologique" directement.

    De plus on peut se debarasser des problemes de fiabilite des donnes, en comparant par exemple des populations peu exposé a certain polluants (certaines parties du monde ou l'agriculture intensive n' a pas fait de ravage par exemple) et obtenir des echantillons de plusieurs milliers d'individus pour chaque groupe sans probleme que l' on aura sous la main.

    C'est une question de prorites, et selon moi c'en est une. On ne peut pas passer a cote de tels problemes qui risqueraient de compromettre notre avenir biologique. Sinon a quoi sert la science.

    • Nadine Kirchgessner Répondre | Permalink

      bonjour , vous écrivez

      "Le QI n'est peut etre pas le bon outil car il se fonde sur l'apprentissage"

      au départ, Weschler avait inventé des tests pour mesurer l'intelligence de tous, et notamment de personnes qui n'avaient pas fait d'études.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Bien sûr, toutes les questions que vous posez sont légitimes, et il ne s'agit aucunement de balayer des hypothèses d'un revers de main sans les avoir évaluées sérieusement. La démarche de notre article n'est pas de rejeter à tout prix l'hypothèse du déclin, mais d'examiner si les données actuelles soutiennent cette hypothèse suffisamment pour justifier la panique qu'essayent de déclencher Edward Dutton, Michael Woodley, Barbara Demeneix et les journalistes qui diffusent leurs idées. Notre article répond par la négative, mais comme nous le disons sur la fin, il faudra 10 à 20 ans de plus de données sur le QI pour pouvoir distinguer avec plus de confiance un simple plafonnement du début d'un déclin.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      "Soit ils trichent, soit ils ont raison". Il y a tout de même des cas intermédiaires très fréquents: les gens qui se trompent tout en étant honnêtes et sincères, et ceux qui sont aveuglés par leurs croyances a priori, au point de ne plus bien faire le travail d'évaluation des données à l'appui et à l'encontre de leur croyance (le fameux biais de confirmation).

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Comme le dit Nadine, le QI n'est pas censé se fonder sur l'apprentissage, il essaye au contraire de mesurer la capacité intellectuelle indépendamment des apprentissages. C'est pour cela par exemple que même les tests verbaux se font sans lecture. Néanmoins, les tests de QI échouent dans cet objectif, et la performance dans tous les tests (même non verbaux) est affectée par les apprentissages et la scolarisation. De ce point de vue, les temps de réaction n'offrent pas la porte d'accès directe au système nerveux que vous imaginez. Ils nécessitent de la vigilance, de l'attention focalisée, de l'inhibition, la compréhension d'instructions, et la soumission à une situation de test hautement artificielle. Autant de choses développées en partie par l'éducation et la scolarisation. Ils sont aussi sujets aux effets d'entrainement. Bref, il n'y a pas vraiment de raison de vouloir accorder plus de poids à l'évolution des temps de réaction qu'à celle de n'importe quel autre subtest de QI.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Enfin, la proposition que vous faites de comparer des populations ayant des niveaux d'exposition différents est bien sûr une possibilité à exploiter, mais en pratique cela risque d'être très compliqué, car de telles populations ont toutes les chances de différer sur bien d'autres caractéristiques que la seule exposition aux polluants, et donc si l'on trouve des différences de QI entre ces populations, il sera bien difficile de les attribuer avec certitude aux polluants plutôt qu'à n'importe quel autre facteur confondu.
      Il n'est même pas impossible que par exemple des populations moins exposées aux organophosphates aient un QI moyen plus faible que des populations exposées, car elles seraient du coup plus exposées à des parasites ayant un effet sur le développement du système nerveux...
      Bref, il y a là une piste de recherche à creuser, mais à condition d'exploiter plutôt des variations d'exposition au sein d'une population, dans des cas où ces variations sont le moins corrélées possibles à d'autres facteurs.

  5. Michael Répondre | Permalink

    Merci pour votre article mesuré, rationnel et objectif.

  6. olivier seller Répondre | Permalink

    Bonjour et merci,
    cet autre article montre que jusqu'à présent l'espérance de vie est en croissance constante, les prévisionnistes n'osent plus prédire de stagnation: https://theconversation.com/esperance-de-vie-peut-on-gagner-six-heures-par-jour-indefiniment-98188
    Au sujet du dysgénisme: si j'ai bien suivi un de vos précédents articles, le QI est faiblement héritable. On doit donc pouvoir modéliser l'impact: est-ce que les partisans de cette hypothèse l'ont fait ?
    Autre question: sait-on si l'écart-type du QI augmente plus ou moins que la moyenne ?
    Et enfin, si on suit vos articles sur les croyances: les gens sont de plus en plus intelligents, mais réfléchissent de moins en moins !

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Effectivement l'espérance de vie continue à croître, grâce aux progrès médicaux continus sur les maladies les plus létales. Mais en fait les débats sur les limites de la longévité ne portent pas tant sur l'espérance de vie que sur l'âge maximum atteint par les centenaires. Le fait est que le record établi par Jeanne Calment (122 ans) en 1997 n'a plus jamais été atteint, ni même approché, depuis 20 ans.
      Une référence utile: http://www.nature.com/articles/nature19793
      Une autre montrant que le débat continue: http://www.nature.com/doifinder/10.1038/nature22784, mais il s'agit uniquement d'un débat statistique sur une éventuelle inversion de la courbe de longévité.
      Il n'y pas contestation du fait que le nombre de personnes dépassant 110 ans reste faible, n'augmente quasiment pas, et qu'elles ne dépassent plus 115 ans.
      Evidemment les extrapolations vers l'avenir sont toujours hasardeuses.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Dysgénisme:
      La corrélation négative entre QI (ou niveau d'éducation) et nombre d'enfants est bien établie, toutes les études montrent la même tendance.
      Pour l'impact prédit sur la tendance dysgénique, Richard Lynn a fait des estimations:
      https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160289607000463
      mais sa méthode est très problématique (car se basant sur le QI national), donc ces estimations ne sont pas crédibles.
      Des auteurs islandais plus sérieux estiment la tendance dysgénique associée au niveau d'éducation à 0.01 écart-type (soit 0.15 points de QI) par décennie. Négligeable à notre échelle, mais pas forcément sur une très longue période.
      http://www.pnas.org/lookup/doi/10.1073/pnas.1612113114
      Le récent article basé sur les données norvégiennes rejette l'hypothèse qu'une tendance dysgénique soit d'ampleur à expliquer les variations de QI:
      http://www.pnas.org/content/early/2018/06/05/1718793115

      • Tiremont Répondre | Permalink

        L'héritabilité de l'intelligence donnée dans cette étude est beaucoup trop basse pour être réaliste.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      "les gens sont de plus en plus intelligents, mais réfléchissent de moins en moins"
      Je ne suis pas sûr que si vous rencontriez les français moyens de 1900, vous trouveriez qu'ils réfléchissent plus ou mieux que nos contemporains, ou qu'ils ont des croyances moins aberrantes. Bien au contraire.

      A ce propos, j'ai noté ce passage du dernier livre de Steven Pinker, qui nous rappelle ce que croyaient les gens avant les Lumières:

      The historian David Wootton reminds us of the understanding of an educated Englishman on the eve of the Revolution in 1600 : He believes witches can summon up storms that sink ships at sea… He believes in werewolves , although there happen not to be any in England — he knows they are to be found in Belgium … . He believes Circe really did turn Odysseus’s crew into pigs . He believes mice are spontaneously generated in piles of straw . He believes in contemporary magicians … . He has seen a unicorn’s horn , but not a unicorn . He believes that a murdered body will bleed in the presence of the murderer . He believes that there is an ointment which , if rubbed on a dagger which has caused a wound , will cure the wound . He believes that the shape , colour and texture of a plant can be a clue to how it will work as a medicine because God designed nature to be interpreted by mankind . He believes that it is possible to turn base metal into gold , although he doubts that anyone knows how to do it . He believes that nature abhors a vacuum . He believes the rainbow is a sign from God and that comets portend evil . He believes that dreams predict the future , if we know how to interpret them . He believes , of course , that the earth stands still and the sun and stars turn around the earth once every twenty - four hours

      Pinker, Steven. Enlightenment Now: The Case for Reason, Science, Humanism, and Progress (p. 9). Penguin Books Ltd.

    • Nadine Kirchgessner Répondre | Permalink

      Bonjour, pourquoi écrivez-vous que « le QI est faiblement héritable. »
      Je viens de relire cet article de Franck Ramus : extrait
      « Sans rentrer dans le détail des chiffres, ces études permettent de conclure que la plupart des caractéristiques humaines cognitives ou comportementales, normales ou pathologiques, ont une héritabilité significative (McGuffin, Riley, & Plomin, 2001). »
      https://scilogs.fr/ramus-meninges/au-dela-de-linne-et-de-lacquis/

      • LG Répondre | Permalink

        Effectivement, l'auteur du commentaire n'a pas si "bien suivi" que ça les travaux de M. Ramus (ou de tout un tas d'autres spécialistes en la matière) puisque dans le 'combat' héritabilité versus environnement, le premier semble majoritaire dans l'explication des comportements, traits de personnalités et intelligences notamment . On semble bien loin de l'homme 'tout culturel' (= influencé uniquement par l'environment) que certaines idéologies on essayé de nous vendre. En synthétisant, j'ai cru comprendre qu'on serait autour de 60/40 (en faveur de l'héritabilité bien sûr).
        Mais M. Ramus pourra peut être nous confirmer ce chiffre, voire nous confirmer si il a un sens (scientifique)...

        • verdurin Répondre | Permalink

          J'ai un peu étudié les mathématiques, pas à un niveau très élevé (agrégation).
          Mais je me pose quelques questions :
          -- pourquoi « l'intelligence » suit-elle une loi normale ?
          -- comment conclure, à partir d'un coefficient de corrélation, une causalité ?

          • olivier seller | Permalink

            -théorème de la limite centrale, en supposant que l'intelligence est la somme de nombreuses capacités, indépendantes.
            -une corrélation indique soit une causalité entre les 2 variables, soit une causalité externe

          • Franck Ramus | Permalink

            Pour compléter la réponse d'Olivier:
            - le théorème de la limite centrale est une raison théorique d'attendre que la distribution des scores de QI soit normale. C'est aussi une observation empirique que les scores sont distribués à peu près normalement. Mais ce n'est qu'une approximation. En fait il semble que le kurtosis soit positif, autrement dit il y a plus d'individus aux extrêmes que ce que prédit une loi normale.
            - une corrélation est toujours compatible avec plusieurs interprétations. D'autres données peuvent contribuer à rejeter certaines de ces interprétations, et donc à conforter une hypothèse particulière sur un lien de causalité. Par exemple, si l'une des variables (QI dans l'enfance) est mesurée avant l'autre (niveau d'études atteint), cela permet de rejeter l'hypothèse d'un lien de causalité de la seconde vers la première.

      • olivier seller Répondre | Permalink

        je pense que "significative" a ici un sens statistique, synonymes "prouvé", "pas l'effet du hasard". Un effet peut alors être significatif et faible.

  7. A. Atsou-Pier Répondre | Permalink

    @ Franck Ramus, 22-06-18, 18 h 10

    “The historian David Wootton reminds us of the understanding of an educated Englishman on the eve of the Revolution in 1600 : He believes witches can summon up storms that sink ships at sea…, etc., etc.”

    Cet historien David Wootton, cité par Steven Pinker, dont je ne suis pas une grande admiratrice, n’exagère-t-il pas un peu ?
    Par exemple cet Anglais éduqué (ou plutôt non éduqué !) d’autour de 1600 qui croyait que les sorcières pouvaient faire couler son bateau était capable de construire ce même bateau par cœur, sans aucun plan. Il était aussi capable de construire des cathédrales magnifiques, avec, sauf erreur, un seul architecte. La philosophie scolastique était d’un très haut niveau. Idem la peinture. Etc., etc.
    Ce n’est pas comme si Les Lumières (avec majuscules) sont descendus tout d’un coup du ciel pour éclairer l’humanité. C’était un long processus, accéléré à un certain moment par l’idée (et la possibilité) qu’on ferait mieux de vérifier par des expériences ce qu’on croyait a priori.
    Je n’ai que des ouvrages d’historiens de la science néerlandais, sinon je donnais des références. Mais ce processus est certainement aussi décrit par des historiens francophones ou anglophones.
    Je donne pourtant une référence : Floris Cohen, « De herschepping van de wereld » (La recréation du monde). Traduit en allemand sous le titre « Die zweite Erschaffung der Welt ».

    En résumé, au Moyen Age on n’était pas aussi stupide ou crédule que la citation de David Wootton le suggère, ni dans nos contrées, ni ailleurs.

    Par ailleurs, “He believes the rainbow is a sign from God” n’a rien à chercher dans l’énumération de David Wootton. C’est une simple convention entre croyants. Moi je crois que le feu rouge est un signe de l’Etat disant que je dois arrêter ma voiture. Aucune différence. Ils manquent un peu de sens critique, David Wootton et Steven Pinker !

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Sans rentrer dans la question des capacités que vous attribuez aux Anglais de 1600, ce n'est pas le propos. Personne ne dit que les gens avant les Lumières étaient idiots. Ce qui est dit, c'est qu'ils avaient des croyances surnaturelles qui nous paraissent ridicules, quand bien même ils étaient intelligents et éduqués et capables de faire des choses sophistiquées. Il y a un découplage entre les capacités cognitives, et le fait d'en faire usage pour appréhender le monde de manière rationnelle. Nous le constatons encore aujourd'hui (les humains sont plus intelligents qu'ils n'ont jamais été, mais continuent massivement à croire à des fariboles), et c'était bien pire avant. La rationalité est une potentialité de l'esprit humain, mais ce n'est pas son mode de fonctionnement naturel et spontané. Lisez par exemple Daniel Kahnemann "Thinking fast and slow".

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      “He believes the rainbow is a sign from God” n’a rien à chercher dans l’énumération de David Wootton. C’est une simple convention entre croyants. Moi je crois que le feu rouge est un signe de l’Etat disant que je dois arrêter ma voiture.

      Je ne comprends pas cette analogie. L'hypothèse selon laquelle l'interprétation d'un feu rouge est une simple convention est confirmée par la lecture du code de la route. L'hypothèse selon laquelle l'interprétation d'un arc-en-ciel comme un signe de Dieu est une simple convention (plutôt qu'une croyance) est confirmée par quoi?

  8. Fabien Répondre | Permalink

    Merci beaucoup pour cet article très complet !
    Je signale au passage que Stéphane Foucart a récemment critiqué cet argumentaire dans sa chronique du Monde : https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/06/23/l-environnement-pese-t-il-vraiment-sur-nos-qi_5320020_3244.html
    Voici l'extrait où il vous cible clairement, sans pourtant vous nommer :

    "Cette alerte serait fantaisiste, rien de moins qu’une « fake news », a-t-on pu lire ici ou là, sous la plume de deux neuropsychologues. Pas de quoi s’inquiéter, disent-ils. D’abord, une vaste méta-analyse publiée en 2015 dans la revue Perspectives on Psychological Science, couvrant la période 1909-2013 et rassemblant des données de 31 pays, ne montre pas de déclin. Ensuite, ajoutent-ils, l’étude qui suggère une baisse du QI en France a été conduite sur un échantillon trop petit (79 personnes) et est sujette à caution. Et puis les Etats-Unis voient, eux, leur QI moyen continuer de monter dans les années récentes – or l’exposition de la population à des polluants n’y est pas moins importante qu’ailleurs…
    C’est peu de dire de cet argumentaire qu’il est trompeur. La grande méta-analyse mondiale qui ne montre aucun déclin du QI jusqu’en 2013 ? En réalité, elle n’a pris en compte presque aucune donnée strictement postérieure au milieu des années 1990 ! Seuls une dizaine des plus de 500 échantillons utilisés dans l’étude ont été évalués sur une plage de temps débutant après 1995. Et cette dizaine d’échantillons ne concernent que trois pays : l’Arabie saoudite, l’Allemagne et le Brésil.
    En clair, la méta-analyse en question est certes très utile pour estimer les gains continus de QI tout au long du XXe siècle – un phénomène bien connu sous le nom d’« effet Flynn », du nom de son découvreur, James Flynn –, mais elle ne dit rien ou presque de ce qui se produit depuis 1995. Par ailleurs, elle mentionne bien l’amélioration de l’environnement comme l’une des causes à l’augmentation du QI aux Etats-Unis dans la seconde moitié du XXe siècle : le retrait du plomb de l’essence a fait baisser la contamination de la population par ce neurotoxique avéré…
    Quant à l’étude française suggérant un déclin récent du QI, est-elle vraiment fondée sur un échantillon trop petit (79 individus) pour être décisive ? Indéniablement. Mais qu’en est-il des Etats-Unis où, assurent nos deux neuropsychologues, le QI continue d’augmenter ? Il semble bien que cette augmentation récente du QI outre-Atlantique soit fondée sur des échantillons (respectivement de 126 et de 240 individus) tout aussi minuscules, vu la taille et la diversité de la population américaine – ce que les deux intéressés se gardent bien de préciser…"

    Personnellement je n'ai guère confiance en l'expertise ou en l'objectivité de M. Foucart (sur bien d'autres sujets, notamment le glyphosate mais pas seulement, il a déjà fait montre d'un militantisme assez forcené), mais je suppose que vous êtes intéressé d'entendre les réactions du journaliste scientifique du "journal de référence". Et pour tout avouer je ne serai pas contre non plus de connaître les réponses qu'on peut lui fournir 🙂

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Merci. Effectivement son fact-checking laisse sérieusement à désirer. Une réponse est prévue.

  9. paris Répondre | Permalink

    Le QI a une distribution ethnique . Les flots migratoires changent les QI locaux.
    https://freerunsca.org/iq-levels-by-country
    Rien de bien nouveau. Que cela plaise ou non aux inquisiteurs du politiquement correct. La science est la science. Nier la verite est antiscientifique.
    Et d'ailleurs le QI est un mauvais predicteur du "succes" . Le principal facteur, a intelligence egale, est le quotient emotionnel QE. L'intelligence emotionnelle est bcp plus predictive de succes.
    https://www.verywellmind.com/iq-or-eq-which-one-is-more-important-2795287

    L'universite de Harvard est sujette en ce moment a de multiples proces de la part de la communaute asiatique americaine, pour discrimination contre l'enorme vague de l'intelligence asiatique dans les universites americaines qui menace de phagociter l'essentiel des places offertes.
    Le poltiquement correct/ingenierie sociale peut etre utilise contre les gens superieurement intelligents.

    Est ce souhaitable?

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Le QI a une distribution ethnique

      Le QI moyen (en score absolu) des populations diffère en fonction du pays, c'est exact. Vous semblez croire que l'interprétation en termes de différences génétiques est évidente, or elle ne l'est pas du tout. Ces pays diffèrent par une myriade de facteurs qui ont une influence sur le développement du cerveau et sur le QI. Un premier est la scolarisation et la littératie. Un second est l'exposition à des facteurs toxiques et à des maladies infectieuses pendant la gestation et pendant la petite enfance.
      Sur le rôle de la scolarisation et de la littératie sur le QI, voyez ces deux méta-analyses:
      Ritchie, S. J., Bates, T. C., & Plomin, R. (2015). Does Learning to Read Improve Intelligence? A Longitudinal Multivariate Analysis in Identical Twins From Age 7 to 16. Child Development, 86(1), 23‑36. https://doi.org/10.1111/cdev.12272
      Ritchie, S. J., & Tucker-Drob, E. M. (2018). How Much Does Education Improve Intelligence? A Meta-Analysis. Psychological Science, 0956797618774253. https://doi.org/10.1177/0956797618774253

      Sur le rôle des maladies infectieuses sur le QI, voyez cette étude:
      Eppig, C., Fincher, C. L., & Thornhill, R. (2010). Parasite prevalence and the worldwide distribution of cognitive ability. Proceedings of the Royal Society B-Biological Sciences, 277, 3801‑3808.
      qui montre que la prévalence des maladies infectieuses à travers le monde explique très bien les différences de "QI national".

      Quel rôle reste-t-il pour des différences génétiques? Nul ne le sait, mais il n'y a actuellement aucune preuve d'un tel rôle, et aucun besoin de cela pour expliquer les différences observées de "QI national".

      La science est la science. Nier la verite est antiscientifique

      Certes. Mais pour approcher "la vérité", il faut commencer par connaître les données.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      le QI est un mauvais predicteur du "succes" . Le principal facteur, a intelligence egale, est le quotient emotionnel QE. L'intelligence emotionnelle est bcp plus predictive de succes.

      Il existe une masse colossale de données montrant que le QI est un excellent prédicteur du succès, scolaire ou professionnel. Nous avons encore retrouvé cela dans notre récente étude basée sur des données françaises (de l'Education nationale):
      Guez, A., Panaïotis, T., Peyre, H., & Ramus, F. (2018). Predictors of the IQ-achievement gap in France: A longitudinal analysis. Intelligence, 69, 104‑116. https://doi.org/10.1016/j.intell.2018.05.008
      http://www.lscp.net/persons/ramus/docs/INTELL18.pdf

      Amusant, cette légende urbaine selon laquelle le "quotient émotionnel" (concept scientifiquement douteux à la base) prédirait mieux le succès que le QI (une affirmation similaire concerne la personnalité). Avez-vous fait l'effort d'essayer de remonter à la source de cette affirmation? Moi oui. Il n'y a rien derrière. Les études de Daniel Goleman ne montrent pas cela.

      Sur le mythe de l'intelligence émotionnelle, lisez cet article: Waterhouse, L. (2006). Multiple intelligences, the Mozart effect, and emotional intelligence: A critical review. Educational Psychologist, 41(4), 207–225. http://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1207/s15326985ep4104_1 (vous pouvez lire aussi la réponse peu convaincante des supporters du concept)

      Sur la prédiction du succès professionnel, lisez cette méta-analyse montrant que l'IE explique une fraction minime de la variance par rapport au QI:
      Joseph, D. L., & Newman, D. A. (2010). Emotional intelligence: An integrative meta-analysis and cascading model. Journal of Applied Psychology, 95(1), 54‑78. https://doi.org/10.1037/a0017286
      http://workplaceinsight.net/wp-content/uploads/2018/03/JosephNewman2010.pdf

  10. paris Répondre | Permalink

    Nous apprecierons certainement l'argument du mythe urbain... ca faisait longtemps.

    Demontrez nous que c'est un mythe.
    Je ne vois rien de satisfaisant sauf votre pensee erronee que le succes est 1) professionel (tres zen comme concept) 2) ca ne vaut que pour les gens qui sont employes, la plupart des riches, tres riches ne sont pas salaries. Etes vous successful? pas pour moi.
    Probablement etes vous satisfait mais dans votre position sociale je serais tres deprime.
    Mon QI est 170. Quel est le votre?

    "Quel rôle reste-t-il pour des différences génétiques? Nul ne le sait, mais il n'y a actuellement aucune preuve d'un tel rôle, et aucun besoin de cela pour expliquer les différences observées de "QI national"."
    On a tous bien rigole.
    Vous confondez comme toujours absence de preuve et preuve de l'absence. C'est assez exasperant et desesperant . C'est le niveau 0 de la demarche scientifique.
    Si vous lisiez le chinois je vous ferais parvenir qq etudes mais je ne me fais pas d'illusions. Parlant des chinois justement, qui sont deja genetiquement les plus intelligents, on peut sans grand risque penser que le QI de la Chine restera au top compte tenu de l'absence d'immigration a bas QI (ou d'immigration tout court).

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Demontrez nous que c'est un mythe.

      Vous confondez comme toujours absence de preuve et preuve de l'absence. C'est assez exasperant et desesperant .

      Je suis admiratif de la cohérence de raisonnement que permet un QI de 170.

  11. Camus. F Répondre | Permalink

    Quelle patience Franck Ramus !
    Vous répondez à la bêtise et les idées reçues par l'argument scientifique,les études,les méta-analyses et de nouveau on vous répond par le complexe,la bêtise et la jalousie.
    Quand la génétique est non comprise et utilisée à des fins nauséabondes cela me donne la nausée. J'ai limite honte pour les auteurs de certains commentaires. L'injonction se résume presque à " balance ton QI " . o tempora o mores ! On devrait inventer une autre échelle Adult Stupidity Scale pour évaluer le Quotient de Bêtise . Les vraies personnes HPI ne tombent jamais dans les bassesses que je viens de lire à l'encontre de Mr Ramus et son travail. Une critique constructive c'est tout le contraire de cela. Demain tous crétins ou pas?
    Certains propos ici à eux seuls pourraient élever le niveau national de crétinerie.
    Alors je préfère faire résonner les mots de Camus: " La vérité est mystérieuse, fuyante, toujours à conquérir. La liberté est dangereuse, dure à vivre autant qu'exaltante" quelle finesse, quel talent ! Pas besoin de savoir son QI pour goûter son immense intelligence.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Merci. Nous sommes bien d'accord que certains commentaires discréditent totalement leurs auteurs et ne méritent aucune réponse. C'est le cas de celui qui précède.

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Tant que vous ne lirez que des articles d'opinion dans des médias alternatifs, plutôt que de vous efforcer de lire et de comprendre les articles de recherche originaux, il vous sera difficile d'apporter la contradiction ici.

  12. Camus. F Répondre | Permalink

    Alors pour répondre à " Blaise Pascal " je n'ai aucune prétention scientifique, donc ne confondez pas une opinion sur vos interprétations avec un argument scientifique pour un QI de 170 c'est hallucinant à mais vous n'avez pas précisé l'échelle dommage. Je préfère lire les études citées moi-même ou à travers l'analyse de Franck Ramus ou Nicolas Gauvrit et d'autres scientifiques. Ha oui c'est vrai Franck Ramus n'est pas un homme de science. Il paraît qu'il vendait des glaces et un jour en passant devant le CNRS, la lumière l'a attiré,donc il est entré visiter les lieux ,il a trouvé cela sympa et s'est mis à écrire des articles et les chercheurs le laisse faire car Franck est fort sympathique.Idem pour Nicolas Gauvrit,il était pâtissier et un jour en s'endormant il a vu la lumière,celle de la grâce et s'est réveillé mathématicien. " je n'ai jamais rencontré un littéraire à haut QI" mon dieu à t'on déjà lu pareille ineptie, il faut reconnaître que vous n'avez peur de rien ou plutôt de tout c'est facile derrière un écran. L'argument magnifique qui s'appuie sur des données solides " des auteurs parfaitement non lus par les générations actuelles " Camus c'est juste l'auteur français le plus traduit dans le monde, le plus réédité et analysé ces 10 dernières années,quand à la catégorie de personnes inventée par vos soins elle n'existe pas en revanche vous y gagnerez à lire un peu plus. Charité ordonnée commence.... vous vous targuez d'amener des arguments scientifiques alors que vos propos ne sont étayés par aucune étude ou alors elle est déformée par votre esprit haineux. Quand vous dites à Mr Ramus" dans votre positon sociale blabla et mon QI est de 170 et le vôtre" c'est sûr que là j'ai jamais lu un argument aussi scientifique,sérieux,pertinent. C'est bien le reproche que je vous fait, vous êtes dans l'attaque de la personne et non pas dans la critique constructive de l'article,vous n'êtes absolument pas crédible. Ce sont vos interprétations qui sont nauséabondes pas la Science pour laquelle j'ai un immense respect contrairement à vous qui lui faites du tort à chaque mot. Ne vous prenez pas pour Turing avec vos petits commentaires ,publiez,cherchez,après vous pourrez nous faire partager vos travaux mais vu le niveau de votre écrit je doute fort d'une telle trajectoire. Les scientifiques sont dans leur ensemble de grands littéraires l'un n'empêche pas l'autre,il n'y a qu'un esprit étriqué pour penser une telle chose. Vu votre soi disant niveau vous devriez mettre votre énergie à essayer de comprendre d'ou vous vient cette obsession bizarre pour le QI ce n'est pas très sain. Vous croyez qu'une personne se résume à un chiffre c'est parfaitement ridicule,seule un faible à besoin de se mettre en avant de la sorte, ou un blessé narcissique.Peut être que la Science ne veut pas de vous,qu'elle vous a rejeté mais de grâce ce n'est ni de ma faute,ni celle de Franck Ramus calmez votre fiel et trouvez le chemin de l'apaisement.
    Blaise Pascal et Allan Turing je vous présente mes excuses, parce que vous n'avez rien de commun bien sûr avec ces deux grand scientifiques ou peut être étaient ils humoristes:)

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Ne vous donnez pas tant de mal. Juste un "zèbre" qui se prend pour un génie mais qui ne sait que faire le troll. Probablement toujours le même, sous différents pseudos ici et sur facebook.

      • Camus. F Répondre | Permalink

        Merci vous avez parfaitement raison Mr Ramus, mais j'avoue que cela m'a beaucoup amusé de répondre à ce grand génie de la " zebritude " .

    • Franck Ramus Répondre | Permalink

      Juste une opinion, une référence citée qui ne dit rien de pertinent sur cette opinion, donc aucun crédit.

  13. A. Atsou-Pier Répondre | Permalink

    @ Franck Ramus, 05-07-18, 13 h 13

    J’ai oublié de dire : Merci pour ce bel article, qui me donne de multiples pistes pour approfondir le sujet du QI et de l’effet Flynn. Ce que j’aurais dû faire il y a longtemps.

    Kahneman et ses deux vitesses de pensée, il a certainement raison. Mais cela s’applique-t-il aussi à la pensée humaine d’aujourd’hui versus celle d’avant 1600 ? N’ayant pas lu son livre, je n’en suis pas tellement certaine. La raison et/ou les capacités cognitives de l’homme médiéval, auraient-ils été si différentes des nôtres pour pouvoir dire : c’était bien pire avant ? Les circonstances étaient tout autres, il me semble.
    Je crois plutôt à une unique raison à deux vitesses et à géométrie variable …

    @ Franck Ramus, 05-07-18, 13 h 16
    Concernant l’arc-en-ciel comme signe de Dieu de la liste de David Wootton, la confirmation est évidemment donnée par Genèse 9 : 13. En tout cas, c’est la base de la convention des croyants sur ce sujet. Tout comme la législation est la base de notre convention sur le feu rouge.
    Après une nouvelle réflexion, je suis toujours convaincue que l’exemple de l’arc-en-ciel est mal choisi. Pratiquement tous les exemples concernent des superstitions pour lesquelles la science a trouvé de meilleures réponses. Pour l’arc-en-ciel il n’y a pas de meilleure solution à donner par la science (même en temps bibliques on savait probablement que le soleil et la pluie y étaient pour quelque chose). L’exemple est d’un autre ordre que le reste des exemples : on croit (convient) que x est un signe (symbole) de y ou pas.
    Ou bien l’auteur est un néoathée que je n’arrive pas à suivre. Ils ont souvent des raisonnements inimitables.

    PS Le robot me pose bien des problèmes.

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