Quand les bases biologiques de l’homosexualité viennent en renfort de la lutte contre l’homophobie
En France, si vous avez le malheur de défendre l'idée que l'orientation sexuelle est en grande partie déterminée par des facteurs biologiques précoces, au mieux on vous rit au nez, au pire on vous traite de nazi et d'homophobe. Selon la formule consacrée au sein du petit monde intellectuel français, une telle hypothèse rappellerait "les heures sombres de notre histoire".
Dans un article publié il y a un an dans Science et pseudosciences, j'avais défendu cette hypothèse, données à l'appui (comme toujours!). J'avais plus généralement défendu l'idée que les attitudes vis-à-vis de l'homosexualité n'avaient pas de lien direct avec les connaissances scientifiques sur les origines de l'homosexualité. C'est toujours à tort que l'on utilise des résultats scientifiques (réels ou supposés) à l'appui d'une idéologie. Les bases biologiques de l'homosexualité ne nuisent pas plus aux personnes homosexuelles que l'hypothèse inverse, selon laquelle l'orientation sexuelle serait uniquement le fruit d'apprentissages, d'influences sociales et de choix individuels. Des évènements récents viennent d'en apporter une démonstration éclatante.
En février 2014, le président de l'Ouganda, Yoweri Museveni, a promulgué une loi durcissant la répression contre l'homosexualité. Une décision malheureusement bien peu originale sur le continent africain (cf. la carte du journal le Monde). Plus remarquables, en revanche, furent les justifications avancées. En effet le président ougandais a revendiqué la science à l'appui des ses positions: un comité d'experts scientifiques lui aurait indiqué que l'homosexualité était "comportementale, pas génétique". En filigrane, le raisonnement est le suivant: si l'homosexualité était génétique, elle serait d'une certaine manière "naturelle", on n'y pourrait rien, et elle ne relèverait pas de choix individuels. Il serait dans ce cas tout aussi absurde de la condamner qu'il serait absurde de condamner les individus porteurs d'une trisomie 21 pour "déviance". En revanche, si l'homosexualité est un choix individuel d'un style de vie, alors elle n'est pas "naturelle" (voire elle peut considérée comme "contre-nature"), on peut considérer qu'il s'agit d'un "mauvais" choix, et que leurs auteurs en sont juridiquement responsables, donc condamnables. Le président ougandais a donc illustré de manière exemplaire à la fois l'instrumentalisation de la connaissance scientifique (ou supposée telle) à l'appui d'une opinion préconçue, et le fait qu'une conception environnementaliste de l'homosexualité peut, aussi facilement que n'importe quelle autre, être instrumentalisée pour justifier l'oppression des personnes homosexuelles.
Aujourd'hui, qui sont les meilleurs défenseurs des droits des personnes homosexuelles en Afrique? Ce sont les chercheurs qui ont rédigé un rapport pour l'académie des sciences d'Afrique du Sud, rendu public hier (le 10 juin 2015) et mis en avant aujourd'hui par la revue Nature dans son éditorial et dans un article dédié. Ce rapport, intitulé "Diversité dans la sexualité humaine: implications politiques pour l'Afrique", a pour but clairement affiché de faire le point sur ce que dit vraiment la science, n'en déplaise à Yoweri Museveni et à tous ceux qui voudraient l'instrumentaliser. Il fait une synthèse remarquablement fidèle de toutes les études scientifiques relatives au sexe, au genre, à l'identité sexuelle, et à l'orientation sexuelle. Après le bourbier du débat sur la "théorie du genre" en France, on ne pourrait que souhaiter que ce rapport soit intégralement traduit en français et que sa lecture soit rendue obligatoire... En attendant, je me contenterai de traduire ici les questions abordées et les principales conclusions du rapport, et d'en reproduire une figure.
"Du fait notamment que ceux qui ont plaidé pour une criminalisation de la diversité sexuelle ont explicitement revendiqué la science, ce rapport examine dans quelle mesure la science soutient les arguments avancés par les promoteurs de ces lois. En se basant sur les données scientifiques récentes, et, autant que possible, sur des revues systématiques des études scientifiques, le rapport vise à fournir un panorama à jour de l'état des connaissances biologiques, socio-psychologiques, et de santé publique, et à évaluer dans quelle mesure elles soutiennent, ou contredisent, les arguments-clés avancés en favaeur des nouvelles lois. Ce rapport considère les questions suivantes:
- Quelles sont les données relatives à la contribution de facteurs biologiques à la diversité sexuelle et de genre? Dans quelle mesure la grande diversité des sexualités humaines est-elle expliquée par des facteurs biologiques?
- Est-ce que des facteurs environnementaux tels que l'éducation et la socialisation expliquent la diversité de la sexualité humaine?
- Existe-t-il des données suggérant que l'orientation homosexuelle serait "acquise" par contact avec les autres, autrement dit, par "contagion sociale"?
- Quelles données existe-t-il à l'appui de l'idée qu'une quelconque forme de thérapie ou de "traitement" pourrait modifier l'orientation sexuelle?
- Quelles données existe-t-il à l'appui de l'idée que l'orientation homosexuelle constitue une menace pour des individus, des communautés, ou des populations vulnérables telles que les enfants?
- Quelles sont les conséquences, en termes de santé publique, de criminaliser les orientations homosexuelles et de tenter de réguler les comportements et les relations liés à certaines formes de sexualités?
- Quelles sont les questions scientifiques actuellement sans réponse les plus critiques, concernant la diversité des sexualités humaines et des orientations sexuelles en Afrique?"
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La diversité sexuelle en images (traduite et un peu explicitée). Identité de genre: comment vous, dans votre tête, vous vous concevez (typiquement femme, typiquement homme, ou quelque part entre les deux). Expression du genre: comment vous manifestez votre genre (basé sur les rôles de genre traditionnels) à travers la manière dont vous agissez, vous vous habillez, vous vous comportez, et vous interagissez (de extrêmement féminin à extrêmement masculin). Sexe biologique: fait référence à des organes, hormones et chromosomes objectivement mesurables. Femelles: vagin, ovaires, chromosomes XX. Mâles: pénis, testicules, chromosomes XY. Le sexe biologique n'est donc pas un concept unidimensionnel, puisqu'il comporte au moins ces trois dimensions, qui sont partiellement indépendantes. Il existe en effet des cas où les trois dimensions ne concordent pas. De plus chacune de ces trois dimensions est un continuum, il existe des cas d'organes sexuels intermédiaires, de même que d'autres combinaisons de chromosomes sexuels. Toutes ces situations peuvent conduire à ce qu'on appelle les conditions intersexuées. Orientation sexuelle: vers quel sexe/genre vous êtes attiré physiquement et émotionnellement (de "exclusivement le sexe opposé" à "exclusivement le même sexe"). |
"Le rapport conclut qu'il y a des influences biologiques substantielles sur la diversité des sexualités humaines et en particulier des orientations sexuelles. Des études ont trouvé des liaisons significatives entre orientation sexuelle masculine et certaines régions du chromosome X. Cette région particulière du chromosome X est également associée à d'autres éléments du développement sexuel. Ces découvertes, publiées initialement en 1993 et confirmées en 2014, associent directement un caractère particulier (l'orientation homosexuelle) au matériel génétique, pour au moins une partie des hommes homosexuels.
Bien qu'elle soit moins étudiée, il y a aussi des données considérables en faveur d'une composante biologique à l'orientation homosexuelle chez les femmes.
Les autres conclusions du rapport sont:
- Aucune donnée n'a pu être trouvée à l'appui de l'idée que l'orientation sexuelle puisse être acquise par contact avec des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres ou intersexes (LGBTI).
- Il n'y a pas de preuves à l'appui de l'idée que la manière dont les parents élèvent leurs enfants, ou que les relations formées entre enfants et parents, aient un impact sur l'orientation sexuelle.
- Il n'y a aucune preuve que l'orientation sexuelle puisse être modifiée par "conversion" ou par thérapie "réparatrice".
- Il n'y a aucune donnée établissant un lien entre l'orientation sexuelle LGB, ou les personnes transgenre ou intersexuées, et le "recrutement" de jeunes gens par des abus sexuels.
- Il y a des données claires montrant que les environnements répressifs augmentent le stress des minorités et ont un impact négatif sur la santé des personnes LGBTI."
Un dernier point intéressant soulevé par le rapport est que, contrairement aux suggestions selon lesquelles l'homosexualité serait un produit importé de la culture occidentale, les données anthropologiques montrent que différents types de relations et d'actes homosexuels étaient très largement tolérés par les sociétés africaines avant la colonisation, et que ce sont en fait les missionnaires qui ont diabolisé l'homosexualité...
Ainsi, quoi qu'en disent les détracteurs des hypothèses biologiques, un examen exhaustif des données scientifiques disponibles suggère que des facteurs biologiques précoces jouent un rôle important dans la détermination de l'orientation sexuelle chez l'humain. Les données décrites dans le rapport sont les mêmes que celles que je décrivais dans mon article, en plus à jour, plus complet et plus détaillé, bien évidemment. De plus, ce rapport illustre exactement ce que je disais: contrairement aux épouvantails qui sont constamment agités, mettre en évidence des facteurs biologiques n'a pas pour conséquence inévitable d'inciter à l'oppression des homosexuels ou de vouloir éradiquer l'homosexualité par sélection génétique. Au contraire, ces connaissances peuvent tout aussi bien être utilisées avec profit par les personnes qui souhaitent lutter contre l'homophobie. De nombreux groupes de défense des droits des personnes homosexuelles l'ont d'ailleurs bien compris depuis longtemps (cf. par exemple LGBT science).
Pour être bien clair, les connaissances scientifiques que l'on a sur les causes de l'homosexualité (quelles qu'elles soient) n'ont pas non plus pour effet de rendre l'homosexualité plus désirable ou populaire. Elles n'ont simplement pas d'implications du tout sur les jugements (positifs ou négatifs) que l'on peut porter sur l'homosexualité. Elles apportent un regard neutre sur des causes et des mécanismes, mais ne sont porteuses d'aucun jugement de valeur. Le rapport de l'académie des sciences d'Afrique du Sud permet avant tout de démonter un argumentaire faussement basé sur la science. Mais il ne dicte pas une politique en faveur des personnes homosexuelles. L'argumentaire pour la dépénalisation de l'homosexualité dans les pays africains repose avant tout sur l'affirmation de valeurs, telles que le respect dû à tous les êtres humains, la liberté et l'autonomie, l'amélioration de la santé publique, qui ne sont pas contenues dans la connaissance scientifique.
Au-delà de sa qualité intrinsèque, ce rapport est exemplaire dans le sens où il illustre le bon fonctionnement de l'expertise scientifique au service de la société. Premièrement, il est essentiel de bien distinguer les questions politiques (ce qu'il faut faire) des questions scientifiques (ce qui est). Lorsqu'on a des raisons de penser que des décisions politiques ou des problèmes de société (par exemple: "faut-il criminaliser l'homosexualité?", "comment réduire les discriminations sexistes?", ou "peut-on confier des enfants à des couples homosexuels?") dépendent de la réponse à une question scientifique ("quelles sont les différentes formes de sexualité observées chez les humains?", "par quels facteurs sont-elles déterminées?", "comment les enfants élevés par des couples homosexuels se portent-ils par comparaison aux autres enfants?"), il faut, avant de préjuger de la réponse et de prendre des décisions, 1) rassembler un comité de chercheurs qui ont une compétence scientifique sur le sujet établie au niveau international (comment fait-on pour les identifier?); 2) leur faire faire une revue systématique et complète des travaux scientifiques internationaux sur le sujet; 3) leur demander d'en écrire une synthèse; 4) si l'on souhaite obtenir d'eux des recommandations politiques basées sur leur synthèse, ils doivent émettre ces recommandations à part, car elles ont un statut différent et ne doivent pas entacher la neutralité de la synthèse. Souvent, il existe déjà de telles synthèses de très bonne qualité effectuées dans d'autres pays, et il suffit de les reprendre et de les mettre à jour si nécessaire. Encore faut-il avoir l'idée que d'autres pays sont confrontés aux mêmes problèmes que nous et ont pu se poser les mêmes questions.
Dans le cas présent, l'académie des sciences sud-africaine s'est en fait auto-saisie. Mais elle n'aurait pas eu à le faire si le président ougandais et les autres dirigeants africains avaient suivi cette démarche. Cette démarche d'utilisation de l'expertise scientifique dans le domaine politique existe en France, mais fonctionne de manière inégale. Il existe en France des institutions dont c'est la spécialité (les différentes Académies, la Haute Autorité de Santé, les expertises collectives de l'Inserm...), et qui fonctionnent généralement bien (sauf exceptions qui peuvent être dues à des conflits d'intérêt ou à des infiltrations par des groupes de pression), mais dont on peut regretter qu'elles soient insuffisamment sollicitées (ou écoutées) par les politiques. Il y a d'autres secteurs (comme ceux de l'éducation, ou des affaires sociales) dans lesquels les politiques n'ont visiblement pas la moindre idée que de nombreuses données scientifiques pertinentes existent (surtout dans les autres pays) et mériteraient d'être prises en compte avant de déclencher une réforme majeure à chaque changement de ministre.
Bibliographie
Academy of Science of South Africa. (2015). Diversity in human sexuality: Implications for policy in Africa. Pretoria: Academy of Science of South Africa.
Balthazart, J. (2010). Biologie de l'homosexualité : On naît homosexuel, on ne choisit pas de l'être. Bruxelles: Mardaga.
Editorial (10/06/2015). Sex and the law. Nature, 522, 127.
Nordling, L. (2015). African academics challenge homophobic laws. Nature, 522, 135–136.
Ramus, F. (2014). Comprendre le système de publication scientifique. Science et pseudo-sciences, 308, 21-34.
Ramus, F. (2014). L'histoire du "gène gay". Science et Pseudo-Sciences, 309, 30-36.
Wilson, G. D., & Rahman, Q. (2005). Born gay : the psychobiology of sex orientation. London ; Chester Springs [Pa.]: Peter Owen.
Pour ceux qui suivent ce sujet, une étude de très grande ampleur sur la génétique de l'homosexualité est parue le 30 août 2019, avec de nombreux résultats intéressants qui mériteraient d'être commentés dans un article dédié: https://science.sciencemag.org/content/365/6456/eaat7693
En reconversion, étudiant en M1 Psychanalyse à distance, je découvre vos articles après une recherche sur "l'affaire Dolto". En des temps où il me semble qu'une couche culturelle assez superficielle est étalée, au(x) profit(s) de ceux qui possèdent (entre autres les médias modernes, au sein desquels "ils veulent se "la faire Dolto", lui régler son compte, se la payer) et de ceux qui aspirent à posséder, l'objectif semblant être de développer, d'étendre une société occidentale consumériste mais dont les moyens et les fins semblent s'être mélangés, étalée donc sur la couche de recherche et de tentatives de pensée objectivée, rationnelle, sensée, celle dans laquelle je découvre votre travail, je voulais simplement vous dire merci. Simplement n'est peut-être plus à sa place le mot "merci" arrivant au bout de la 6ème ligne, mais l'intention est là...
... je n'avais pas lu vos deux écrits sur "Dolto"...
Quelle déception. Ceux sur le genre ou les sources biologiques de l'homosexualité sont si exempts de "parti-pris", de réaction chargée d'affect, ils développent une pensée si précise, toujours à la frontière du savoir, en essayant de s'extirper de l'acceptable, qui est somme toute très datable... Les deux textes sur Dolto ne sont pas dans ce sens des articles. Ils hurlent avec les loups, ils sont écrits à charge, contre... Vous êtes précis et rigoureux dans votre argumentation quand vous êtes pour. Comme beaucoup de penseur. A l'évidence, vous ne connaissez rien -pardon, vous ne comprenez rien au travail d'investigation psychanalytique. Vos extraits, vos citations le singent, le calcifie, en oublie toute la portée thérapeutique à condition que le lien patient/analyste se construise dans une profonde estime du sujet. Ce n'est que dans ce cadre qu'une pulsion, qu'un rêve, qu'un désir ne peuvent être abordés, dé-scripté, décrypté. Il est possible que nous ne travaillions qu'à partir d'hypothèses, la dimension vitale restant le chemin de prise de conscience, d'éclaircissement, de mise en mouvement du sujet souffrant. Vous semblez ainsi que les nombreux messages diffusés suite à vos écrits ne jamais prendre en compte la réalité des situations et des souffrances des patients, d'âges et d'origines sociales, professionnelles, culturelles, confessionnelles très diverses qui viennent et repartent "soulagés", c'est à dire allégés d'un poids, qui souvent est relié à ce que Kierkegaard nommait sa mélancolie. A la lecture, travailler contre vous réduit. Vous assèche. Vous perd. S'il vous plaît, écrivez pour sur des sujets dont vous faîtes des feux d'artifices (sans jeux de mot).
Vous appréciez certains de mes articles et détestez certains autres. Sachez que vous n'êtes pas le seul. Mais sachez aussi que certains de mes lecteurs ont les préférences inverses des vôtres! J'ai écrit un article pour vous: https://scilogs.fr/ramus-meninges/la-rationalite-est-elle-a-geometrie-variable/
D'abord, une méta-observation: quand une étude jargonnise en utilisant le vocabulaire issu des théories du genre, cela en dit long sur son contexte et les objectifs des auteurs. Elle doit donc être, sinon prise avec des pincettes, du moins considérée avec une extrême précaution.
Il en est probablement de même d'études comparant les enfants de couples homosexuels aux autres enfants. De telles études nécessitent un tel recul, une telle finesse, et les raisons de leur existence en disant déjà tellement long sur leur contenu probable, qu'il est à craindre qu'elles ne puissent rien détecter (si ce n'est des choses grossières et tenant de l'évidence).
Ensuite, il paraît clair à (presque) tous les gens censés que l'attirance homosexuelle s'impose de façon naturelle à ceux qui la ressentent, peu importe en fait qu'elle soit génétique ou culturelle, dans l'enfance. A noter que l'abstinence reste un choix cependant, je pense que c'est la base du point de vue religieux condamnant l'homosexualité, non pas en tant que sentiment mais en tant qu'acte. L'ancien testament, par exemple, ne condamne que les actes homosexuels et donc il lui est parfaitement indifférent de savoir leur origine, génétique ou non.
Freud parle de perversion, mais ne met aucun sens moral derrière ce terme - il faut juste l'entendre au sens d'un détournement de l'objet. En revanche, il associe à l'homosexualité des traits de caractère bien précis - ce qu'il appelle le caractère anal, un stade de développement plus infantile, moins sublimé, tout ceci ayant des aspects positifs et négatifs sur la personnalité. Pour hyper-simplifier, les homosexuels feraient les meilleurs professeurs, les meilleurs sublimateurs de l'essentiel féminin (la mode) mais le caractère anal est aussi associé à une forme d'obsession, d'amour de la propreté, de l'argent, à un caractère retors. On retrouve plus ou moins tous les stéréotypes sur l'homosexualité, non pas ici déconstruits mais reconstruits. Il y a aussi la croyance populaire qui associe au terme "PD" l'hypocrisie. Tout ceci, ce sont des stéréotypes, mais pas forcément des erreurs. Il a pu se développer par exemple chez les homosexuels, comme chez les juifs (les accusations étant proches), un besoin culturel de dissimulation et de mensonge, un sentiment d'exclusion entraînant une diminution de la fidélité à la société, etc. Il serait bien plus intéressant de disposer d'études fiables et sincères cherchant à étudier ces différents traits, en comparant par exemple les comportements dans les pays où l'homosexualité est réprimée et ceux où elle est libre, etc. Et sans biais a priori interdisant d'aller chercher la perversion de caractère intrinsèque. Ce serait moins politiquement correct, mais plus instructif.
Vous faites une pétition de principe sur la base de mots que vous considérez suspects. Mais cela en dit plus sur vos préjugés que sur les concepts en question. S'il y a dans cet article des concepts que vous jugez non valides, dites précisément lesquels et pourquoi, et à partir de là on peut discuter.
Là aussi, c'est une pétition de principe qu'une certaine catégorie d'études ne peut rien prouver parce qu'elles seraient biaisées. En raisonnant comme cela, vous ne risquez pas de jamais modifier vos opinions, quels que soient les faits! L'objet d'un blog rationaliste comme celui-ci est au contraire d'inviter les gens à conformer leurs croyances aux faits plutôt que l'inverse.
En réalité, les biais, cela s'observe, cela se quantifie, et on peut même estimer dans quelle mesure des résultats obtenus sont entièrement attribuables aux biais ou s'ils leurs survivent. Bref, si vous souhaitez affirmer que les conclusions d'études sont fausses parce qu'elles sont biaisées, la charge de la preuve vous revient d'exposer ces biais, de les quantifier et de quantifier leur impact sur les résultats (ou de citer les études qui l'ont fait).
Pas une pétition de principe mais la simple reconnaissance du fait que les théories du genre sont un lobby politico-ideologique ayant infiltré l'université. Je ne lis pas ces articles, pas plus que je ne lis Minute, pour une raison de temps. Cela n'empêche qu'il y a probablement, parfois, de bons articles dans Minute.
Sur la distinction cruciale entre préférence sexuelle et acte sexuel, nous sommes entièrement d'accord. Cette distinction est importante pour toute discussion de l'homosexualité, comme de la pédophilie ou de toute préférence sexuelle. Vous considérez un point de vue religieux, j'en prendrai un légal: Aucune préférence sexuelle n'est condamnable, mais certains actes le sont (et lesquels le sont dépendent évidemment de la société, de ses attitudes, et de son système juridique).
Sur le dernier point, vous répétez des hypothèses freudiennes jamais prouvées, et vous émettez un certain nombre d'autres hypothèses, sans apporter non plus la moindre donnée factuelle pour les soutenir. Vous semblez supposer que les chercheurs ne sont jamais autorisés à poser de telles questions et à collecter des données pertinentes, ou l'ont fait de manière biaisée, parce qu'ils seraient totalement embrigadés par une idéologie ou contraints par le politiquement correct. Et par conséquent que ce serait peine perdue de chercher de telles études.
Je pense que vous vous trompez sérieusement sur l'étendue des questions que les chercheurs ont posées et des données qu'ils ont collectées. Je n'ai pas le temps de tout chercher, mais par exemple la question de potentielles différences de personnalité entre personnes homo- et hétérosexuelles a déjà été bien étudiée. Une simple recherche sur Google Scholar:
https://scholar.google.com/scholar?q=personality+traits+associated+with+homosexuality
Voici un article intéressant à lire:
Lippa, R. A. (2005). Sexual orientation and personality. Annual Review of Sex Research, 16(1), 119-153.
https://sci-hub.se/https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/10532528.2005.10559831
Ne préjugez pas des biais, lisez! Lisez l'introduction, les questions qui sont posées, la revue des recherches antérieures, vous serez étonné! Lisez la revue Archives of Sexual Behavior https://www.springer.com/journal/10508, vous découvrirez beaucoup de choses!
Bref, pour discuter de tels sujets, mieux vaut éviter de raisonner in abstracto sur la base de Freud et de quelques autres préjugés. Il faut lire les études scientifiques, il n'y a pas d'autre méthode.
Merci pour vos liens. Je cherche à les lire... Articles payants et très coûteux, donc accessible uniquement à la communauté des chercheurs. Ce qui, si ces articles sont vraiment lisibles par des non chercheurs comme moi, constitue un problème sérieux. Et un biais car la communauté des chercheurs est sous certains aspects une communauté d'opinion.
Sur vos autres reponses, il n'y a pas de chercheur "sur-homme", pouvant faire abstraction des problèmes personnels que va lui poser la sélection de tel ou tel thème d'études ou prise de position. Cette pression politiquement correcte est particulièrement forte dans votre domaine.
"S'il y a dans cet article des concepts que vous jugez non valides, dites précisément lesquels et pourquoi, et à partir de là on peut discuter."
Il s'agissait juste d'une méta-observation, mais pas d'un préjugé, bien plutôt de la conclusion à laquelle j'arrive pour tout ce qui touche aux tenants des théories du genre.
Je ne vais pas prendre les exemples dans l'article, mais déjà dans votre illustration.
"Gender identity" est un concept ressenti, subjectif, une forme de suggestion introduite par les tenants de la théorie du genre pour des besoins idéologiques divers. Ce critère a pour effet de créer (suggestion) et d'objectiver une victimisation ressentie et pave ainsi le chemin de la "dictature des minorités" sur un plan plus politique. En aucun cas, un critère important a priori. Imagine-t-on une étude qui demanderait aux gens s'ils se sentent grands ou petits sans les mesurer ?
"Gender expression" : déjà un peu plus objectif mais 1) évidemment culturellement biaisé (cas de hommes écossais en kilt et pb de la définition des "traditional gender roles") et 2) loupe grossissante inutile sur un critère qui n'est là, encore un fois, que pour des raisons idéologiques (sauf cas très spécifique bien entendu).
"Biological sex": Je comprends ce critère et le trouve valide. Mais dans 99%, c'est simplement le sexe des chromosomes. Aller chercher autre chose (sauf là encore sujet d'étude très spécifique), c'est introduire un biais en surestimant l'importance de critères du second ordre .
"Sexual orientation" : Je comprends et trouve valide ce critère.
Bref, sauf cas spécifique encore une fois (car Gender identity et expression peuvent parfaitement faire l'objet d'une étude), sexe et orientation sexuelle sont des concepts suffisant.
Si je vous comprends bien, vous refusez l'identité de genre parce que ce serait une notion subjective. C'est certain, personne d'autre que l'intéressé n'est en mesure de dire si il/elle se sent homme ou femme (ou autre chose), cela ne peut pas se mesurer objectivement de l'extérieur. Ce n'est pas pour autant que ça n'existe pas et qu'il ne faut pas en tenir compte. Si on vous suit en rejetant toute subjectivité, alors on doit aussi s'interdire de prendre au sérieux la douleur, l'humeur, l'anxiété, etc., exprimés par chacun et mesurables objectivement par personne d'autre. Et pourtant, on le fait, et on a bien raison de le faire, car c'est la condition nécessaire pour prendre en charge la douleur, les troubles de l'humeur, les troubles anxieux, etc. Ce qui compte, c'est 1) de prendre au sérieux ce que la personne dit qu'elle ressent; et 2) d'essayer d'objectiver le mieux possible cette expression de la subjectivité. Cela se fait pour la douleur, l'humeur, l'anxiété, j'ai traité cette question dans un précédent article. Cela peut se faire également, avec des méthodes similaires, pour l'identité de genre.
Vous dites que l'identité de genre (discordante avec le sexe, je suppose, ce que les psychiatres appellent dysphorie de genre) est une forme de suggestion. Il est probable, bien sûr, que le nombre de personnes qui se déclarent dans ce cas dépende du regard que la société porte dessus, et même des mots disponibles pour décrire cette sensation et cette situation, sans lesquels on peut avoir du mal à l'identifier et à la conceptualiser. De ce point de vue, c'est comparable à l'homosexualité, qui se révèle plus ou moins dans la société selon que le concept est reconnu ou pas, selon que cette orientation est acceptée, ignorée, niée, ou criminalisée. Mais on ne peut pas en déduire que l'homosexualité est une simple suggestion. Ce n'est pas la société elle-même qui induit l'homosexualité, elle ne fait que moduler sa reconnaissance par les intéressés et son expression plus ou moins ouverte. Il en est de même pour l'identité de genre.
Enfin, vous avez droit à vos opinions, mais il ne vous appartient pas de décréter ce qui est important ou pas. C'est à chacun de décider ce qui est important pour soi, et aux scientifiques de déterminer quels concepts sont importants pour la compréhension de l'être humain.
Je réponds pour les scientifiques: Si on observe que certaines personnes s'identifient à un genre différent de leur sexe, et que cette identification ne se réduit ni au sexe, ni à l'orientation sexuelle, ni à l'expression manifeste d'un genre, alors le concept d'identité de genre semble à première vue utile pour faire une distinction que l'on ne pourrait pas faire autrement. Si de plus il s'avère que ce concept est associé à des comportements, à des risques de troubles, à des pronostics, à des besoins particuliers, qui sont distincts des autres concepts (critère de validité externe), alors cela renforce d'autant plus sa validité et son importance (quoi que vous en pensiez).
Par ailleurs, je pense que vous vous méprenez sur la "théorie du genre". Tout d'abord, ce terme ne correspond pas à un champ de recherche, c'est une expression inventée par des groupes idéologiques pour constituer un homme de paille. Il existe des "études de genre", et on peut tout à fait être critique sur certaines des affirmations qu'elles produisent. Par exemple, sur l'hypothèse que le genre serait une construction entièrement sociale et déconnectée du sexe biologique. A mon sens, les études de genre montrent (ou plutôt suggèrent, car elles s'appuient au mieux sur des corrélations, quand elles s'appuient sur des données tout court) les effets de certains facteurs sociaux sur l'expression du genre, mais elles ignorent les facteurs biologiques et ne montrent pas que seuls ces facteurs sociaux sont à l’œuvre. Bref, il y a pas mal de tri à faire, or ce champ entretient une attitude assez ambivalente vis-à-vis des données factuelles, ce qui ne les aide pas à faire le tri.
En revanche, la notion d'identité de genre, elle, ne repose pas crucialement sur les hypothèses contestables des études de genre, et est à ma connaissance assez consensuelle bien au-delà de ce champ d'études, en psychologie comme en médecine par exemple. C'est ce que redit ce rapport de l'académie des sciences d'Afrique du sud, qui s'efforce de faire un état des lieux scientifique, et ne s'appuie pas excessivement sur les études de genre.