A propos de cuisson de viande
Note liminaire : ce billet est fait dans la hâte, et manquent notamment toutes les références, que j'ai, que je connais par coeur, mais que j'ajouterai ultérieurement. C'est un mauvais exemple pour les étudiants, bien sûr, car la règle s'impose : "une phrase, une ou plusieurs (bonnes) références" !
Mais venons-en au fait. On me fait dire que "mes résultats sur la cuisson de pot au feu démontraient que, lorsqu'on mettait la viande dans l'eau bouillante elle se contractait et que, ainsi, les composés sortaient dans l'eau ; que, par conséquent, si l'on souhaitait donner du goût à un bouillon, il fallait mettre la viande à chaud, tandis que si l'on souhaitait avoir une viande moelleuse et qui est gardé ses composés sapides il fallait démarrer à froid".
Pas sûr d'avoir dit cela !!!! (pardon, je parle par antiphrase)
Tout d'abord, il faut évoquer une étude que j'ai faite, et qui consistait à mettre la même viande, soit dans l'eau froide (20 °C), soit dans l'eau bouillante (100 °C), puis à chauffer les deux casseroles (j'ai quelque part dans mes papiers les proportions de viande et d'eau) (Ref 1).
Ce que j'ai observé, c'est que la masse de la viande diminuait davantage dans l'eau bouillante... avant que les deux moitiés de viande finissent, après quelques dizaines de minutes, avec la même masse au gramme près.
Donc la viande se contracte de la même façon, que le départ soit à froid ou à chaud, et la perte de masse est la même.
Soyons puriste. S'agit-il de "cuisson d'un pot-au-feu" ? Non, plus exactement de confection de pot-au-feu : on ne cuit pas le pot-au-feu, littéralement parlant, mais on cuit de la viande (dans de l'eau).
D'autre part, je crois que les sciences de la nature ne "démontrent" rien : elles établissent des faits, dans des conditions expérimentales particulières. La démonstration est l'apanage des mathématiques (Ref 2).
La viande se contracte quand elle est chauffée : oui, et que ce soit dans un four, sur une broche, dans de l'eau. Car les modifications du tissu collagénique et les dénaturations des molécules de collagène qui composent ce tissu s'accompagne d'une rétraction du tissu, qui expulse une partie de la composante liquide de la viande (Ref 3).
Et oui, des composés sortent de la viande : ce qui est perdu par la viande se retrouve dans le bouillon... ce qui est très important, parce que, ainsi, aucun nutriment n'est perdu, ce qui fut tout à fait fondamental dans l'histoire de l'humanité (nous sommes les premières générations à ne pas avoir connu de famine, faute de nutriments !).
Pour les composés sapides, il y a ceux qui sortent, et ceux que l'on crée : chauffer longtemps (pas une question de température, mais de temps) de la viande, c'est aussi hydrolyser le collagène, et favoriser la formation de peptides et d'acides aminés, par exemple ; on agit aussi sur les triglycérides, etc. (Ref 4).
Pour les composés odorants, tout tient dans le couvercle : il faut éviter leur perte, notamment par un terrible entraînement à la vapeur d'eau.
Le "moelleux" ? Je préfère parler de ces deux composantes que sont la jutosité et la tendreté. Voir mon article https://www.pourlascience.fr/sd/chimie/tendrete-de-la-viande-4341.php
Ce "moelleux", lui, est dû à la dissolution et à la dégradation du tissu collagénique, mais aussi à la coagulation des actines et myosines intracellulaires.
Pour ce qui est du tissu collagénique, donc, il y a d'abord sa dégradation, puis la libération des molécules de collagène, puis la séparation des trois brins polypeptidiques de chaque molécule de collagène, puis la dégradation de ces brins, qui libère donc peptides et acides aminés.
Et comme c'est le tissu collagénique qui s'oppose à la tendreté, l'attaquer fait les viandes plus moelleuses : il faut cuire longuement, à basse température.
On voit finalement combien je suis loin du paragraphe initial, de ce que l'on me faisait dire !
Références
1. Hervé This, Robert Méric, Anne Cazor, Lavoisier and meat stock, C.R.A.S Chimie (2006), 11-12, 1511-1515, doi:10.1016/j.crci.2006.07.002.
2. https://hervethis.blogspot.com/2019/12/la-preuve-nous-dit-cet-excellent-tresor.html
3. Kopp et al.
4. A venir